Le Time s’est montré plutôt acide en annonçant en décembre dernier « the death of French Culture». Au-delà du débat qui s’est engagé sur la mort de la culture française (lire la réponse du Figaro), une autre interrogation surgit : y a-il échec de la diplomatie culturelle ? C’est sur cette question que se penchera Kareen Rispal, conseillère culturelle à l’ambassade de France lors de sa conférence à la Maison Française ce jeudi.
La culture est-elle toujours une priorité du Ministère des Affaires Etrangères ?
La diplomatie culturelle est un appendice utile qui accompagne la diplomatie traditionnelle. Politique volontariste dès ses débuts, proche même de la propagande, elle véhicule l’image de la France via la culture. La diplomatie culturelle est animée par le Quai d’Orsay, qui à travers les centres culturels, enseigne la langue et la pensée française. Ce mouvement a ensuite été relégué par des initiatives privées comme les alliances françaises.
Le réseau culturel est composé de 145 instituts et centres culturels français (dans 92 pays) et de 1075 Alliances Françaises (dans 134 pays). Seulement 300 de ces dernières bénéficient d’une aide du Quai d’Orsay (138 millions d’euros).
Le Quai d’Orsay a un budget très réduit au sein des dépenses de l’Etat. C’est comme ça que ça a toujours été. Néanmoins, c’est 50 000 manifestations culturelles qui ont été organisées par le réseau en 2007.
L’Alliance Française de New York a reçu une subvention de 70 000 dollars, alloué à différents projets ainsi qu’une aide du Quai d’Orsay pour la médiathèque de l’Alliance.
Quelle est la portée de cette diplomatie culturelle?
C’est difficilement chiffrable. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le Président Français a décidé d’instaurer des indicateurs pour mesurer l’efficacité de certaines actions. Il s’agit de s’évaluer à travers des chiffres, des statistiques. Cette démarche, qui rejoint celle de la notation des ministres, fait partie de la réforme de l’Etat souhaité par Nicolas Sarkozy. Cela s’inscrit dans le cadre de la Revue Générale des Politiques Publiques (RGPP). C’est une démarche saine, même vitale. Cela nous force à nous interroger sur la pertinence de nos actions, à en mesurer la portée et l’efficience. Comment rationaliser l’appareil d’Etat pour le rendre plus efficace, plus efficient ? Comment mieux allouer les moyens ? La rentabilité n’est pas la seule notion qui doit nous guider, mais elle doit faire partie de nos préoccupations. Il s’agit de produire le meilleur service avec les moyens alloués.
Quelle forme de diplomatie culturelle prôner vous aujourd’hui?
Cela dépend de ce qu’on entend. Dans une acception étroite, la diplomatie culturelle est un instrument utile mais pas suffisant. Elle nécessite des partenariats avec des acteurs locaux, comme dans le cas du BAM (Brooklyn Academy of Music). Pour promouvoir efficacement la culture française, il faut un rapprochement du dialogue et plus d’intéractivité. Je crois beaucoup aux échanges dans les deux sens. On ne peut plus être dans une logique où l’on impose ou dans une vision unilatérale. Il faut écouter la demande et l’influencer. Jo Melillo du BAM est venu en France où il a vu James Thiérrée, il s’est dit « Tiens, ça ça plairait à un public américain ». En réaction, nous avons organisé le showcase « The French New Circus », pour lui montrer que oui, il y avait James Thiérrée, mais pas seulement. A nous de suciter la curiosité.
Dans une acception plus large, il faut relancer le débat (cf article du Time). Aujourd’hui on est de plus en plus dans l’interrogation, s’interroger sur nos moyens d’actions. La France est toujours aussi créative. Il y a par exemple une vraie spécificité du cinéma français. Hélas, on vit sur des stéréotypes. Notre rôle est d’aller au delà et de propager une vision plus contemporaine. Notre pays a une image touristique très forte. Son important patrimoine historique et culturel lui donne certes une image un peu figée. Mais c’est l’image d’une France créatrice qui se vend mal. On a des difficultés à faire passer le message d’un pays dynamique. Pour le grand public, il y a encore un effort à faire. C’est à la diplomatie culturelle de combattre ces stéréotypes.
“La diplomatie culturelle“, par Kareen Rispal, ce jeudi à 19h à la Maison Française, 16 Washington Mews. Tel: 212 998 8750