A J-10 de la première, par une belle fin de dimanche, la Compagnie Carmina peaufine les derniers réglages de sa première pièce, “Le Dieu du Carnage” de Yasmina Reza , qu’elle jouera du 10 octobre au 2 novembre au Shelton Theater de San Francisco.
Créée il y a seulement quelques mois par Pascale Couderc, metteuse en scène bien connue dans la Bay Area pour de nombreuses pièces jouées par les compagnies Platypus, Generation Theatre, ou Le Théâtre du Coin, la Compagnie Carmina se concentre sur le théâtre contemporain francophone. “Le paysage théâtral en français est assez limité à San Francisco. J’avais déjà créé deux troupes en quinze ans passés ici, mais Carmina a vraiment un objectif précis: jouer des pièces non éditées, que l’on découvre en parcourant les festivals en France“, explique sa fondatrice. “Début 2018, j’avais mis en scène dans cet esprit “Adieu Mr Haffmann”, présentée en off à Avignon l’été précédent. C’était avant qu’elle ne soit montée à Paris et qu’elle remporte 4 Molières.”
La troupe Carmina rassemble d’ailleurs des acteurs qui ont tous joué dans “Adieu Mr Haffmann”, et qui n’ont pas hésité à suivre Pascale Couderc dans sa nouvelle aventure: “Pascale peut nous proposer n’importe quoi, je suis!“, affirme Marion Lovinger, dont c’est la troisième collaboration avec la metteuse en scène. Emmanuelle Lambert, elle, en est à sa douzième pièce sous la direction de Pascale Couderc, qui reconnaît avec humilité qu’il n’est pas toujours aisé de faire du théâtre en français à San Francisco: “Il faut trouver des acteurs: je ne suis ni coach, ni prof de théâtre, et la population francophone ici est plutôt technocrate! Il faut un grain de folie pour monter sur scène et la formation est dure…”
Les quatre acteurs ont appris le texte du “Dieu du Carnage” cet été, avant de commencer six semaines de répétition. “Cette comédie, très cruelle, met en scène deux couples, qui se retrouvent pour discuter amour, mariage, querelles d’enfants…Réunis pour combler l’ennui du dieu du carnage, ces personnages perdent tout contrôle de leur humanité, jusqu’à devenir des bêtes“, explique Pascale Couderc.
Montée au théâtre Antoine en 2008 avec Isabelle Huppert, la pièce a été adaptée par Roman Polanski au cinéma en 2011. Pour les acteurs de Carmina, elle reste furieusement d’actualité: “La pièce n’est pas sans rappeler ce qui se passe ici, en Angleterre, ou au Brésil: on sort complètement de la bienséance des conventions, on se demande si un adulte peut faire tout cela, ou oser dire ce qu’on entend sur scène.” La troupe est impatiente de rencontrer son public, qu’elle espère aussi large que possible grâce à l’utilisation de surtitres en anglais. “Si on fait bien notre boulot, on espère que la pièce amènera les spectateurs à se poser plein de questions.“