Dans sa suite d’hôtel chic et colorée à SoHo, Julie Delpy est au four et au moulin. Vêtue d’une élégante robe noire, elle lance : “Juste un coup de fil et je suis à vous“.
L’actrice est en promo. Elle nous reçoit quelques jours avant la sortie de 2 Days in New York, un film qu’elle a réalisé et scénarisé, dont elle occupe le premier rôle et a composé la bande originale. Comme dans le précédent volet (2 Days in Paris), nous retrouvons Marion la Française (Julie Delpy), cette fois-ci à New York. Elle s’est séparée de son compagnon, et s’est installée avec Mingus (interprété par l’acteur afro-américain Chris Rock). Le couple a prévu de recevoir la famille de Marion en l’honneur de son vernissage de photographie. Mingus, New-Yorkais jusqu’au bout des ongles et fan d’Obama, va voir débarquer chez lui trois Français plus vrais que nature. Un père soixante-huitard et “rablaisien“, une petite soeur exaspérante et nymphomane accompagnée de son petit copain lourdaud.
“Dans 2 Days in Paris, j’avais exploré une toute petite fenêtre des relations franco-américaines: l’Américain à Paris. Mais je n’avais pas encore exploité les envahisseurs français à Manhattan”, s’amuse Julie Delpy. La réalisatrice, qui vit à Los Angeles depuis vingt ans, a vu dans la ville le terrain de jeu idéal pour ce deuxième film. “New York, c’est la ville la plus iconique des Etats-Unis, contrairement à Los Angeles, où l’essence de la ville est plus difficile à capturer”.
Ce film déjanté se moque de la culture et des comportements parfois sans gêne des touristes français quand ils voyagent. Julie Delpy pose un regard volontairement caricatural – mais pas tant que ça – sur nos compatriotes gaulois : “Dans le film, les Français ne font pas des choses si folles que ça (…) J’en connais beaucoup des Parisiens qui rayent des voitures [comme le père de Marion]. Le personnage du beau-frère vulgaire et bête n’est pas du tout exagéré”.
La réalisatrice s’est largement inspirée de sa propre vie familiale: “Les Delpy, c’est le bordel (…) les gens s’aiment beaucoup mais s’engueulent”, dit-elle en riant. Son père, Albert Delpy, qui incarne son propre personnage à l’écran, ne parle pas anglais dans le film comme dans la vie. Comme dans son rôle, il multiplie les maladresses culturelles : « Ce n’est pas un mythe, mon père a essayé de ramener du fromage de chèvre aux Etats-Unis (…) il a même essayé de rentrer des cigares cubains! », s’exclame-t-elle.
Le ton du film tend vers l’humour scatologique : “Ça peut choquer les gens qui vont voir des films contes de fées dans lesquels pas un cheveu ne dépasse. Le fait que j’ai opté pour un couple mixte ne plaira pas à tout le monde, il y a encore des tabous là-dessus dans certaines régions des Etats-Unis“.
Reste à savoir si les familles américaines s’identifieront à la vie de famille agitée et burlesque de Marion. “Quand Chris Rock voit le film, il me dit que ça pourrait être deux familles américaines. Je pense que c’est un peu international”, estime la cinéaste.
Mais à l’instar de Woody Allen, auquel Julie Delpy est souvent comparée, elle ne s’attend pas à ce que ses films intimistes et un poil névrosés fassent l’unanimité. “J’espère avoir la carrière de quelqu’un comme Woody Allen. Il a sa marque de fabrique. Pour l’instant, je cherche encore mon univers“.
Propos recueillis par Oriana Jomby-Diaz et Aude Villiers-Moriamé.
Infos pratiques:
2 Days in New York: le 17 août au Town Center 5, Encino, Los Angeles; le 17 août au Playhouse 7 Cinema, Pasadena; le 17 août au Landmark 12, West Los Angeles.
Crédit photo : Oriana Jomby-Diaz