Chère Viviane,
Je m’appelle Marlène et je viens d’arriver à NYC avec mes quatre enfants. Je pensais vivre à Manhattan mais vu le prix et le manque de placards nous avons été contraint à choisir New Rochelle dans le Westchester. Je suis d’origine Lyonnaise, j’ai fais mes études à Paris où nous habitons, enfin habitions. La campagne, connais pas. J’ai peur de ma rancœur, de mon cafard. Que faire pour m’en sortir avant d’infecter ma famille ?
Bienvenue Marlène au pays des contradictions. Nous imaginons souvent l’Amérique comme étant Los Angeles ou New York City, peut-être Hollywood et Disney. Quel choc pour vous et ceci à plusieurs niveaux: psychologiques, logicielles et familiales. J’imagine le départ étant rude car gérer 4 enfants n’est déjà pas simple mais les préparer et les «exporter» en terrain inconnu, quelle complexité!
Vous ne parlez pas de date mais j’imagine que vous venez d’arriver, vous vous installez entourée de caisses, d’assiettes mal assorties en cherchant en vain tel jouet indispensable, tel objet sentimental. Un déménagement comprend l’emballage certes mais le désemballage est encore plus traumatisant. Les disparitions, les casses sont fréquentes, tournent en drame familial où toutes les frustrations rentrées éclatent symboliquement.
Il faut du temps pour recréer son nid, son chez soi, parfois des semaines passent avant d’avoir ce sentiment d’accueil lorsque l’on pousse la porte d’entrée. En tant que Maman vous êtes le capitaine du navire, vous êtes l’oreille attentive à l’écoute des complaintes craintives, les envies et les espoirs. Vous êtes celle qui doit donner le bon exemple. Au fond vous ne rêvez que d’une chose, que l’école commence, que les enfants soient pris en mains et que vous puissiez vous remettre au lit, tirer la couette au dessus de votre tête et pleurer où crier en vidant votre sac. Comme chaque enfant capte l’humeur de Maman comme un baromètre, il faut faire semblant car les vases communiquant s’agitent surtout en période d’ajustement.
Cette décision de vivre dans une maison, en banlieue n’a pas été la votre. Votre mari a du faire un choix difficile en pensant finance et pragmatique. Vous avez de la chance que New Rochelle soit à 30 minutes de Manhattan, il aurait pu choisir Greenwich, Connecticut à 60 minutes… Nous savons toutes que les hommes sont moins bien programmés pour prévoir les petits détails de la vie quotidienne et leurs conséquences. Cependant de temps en temps il faut se souvenir que votre époux lui aussi subit les inconnus de l’expatriation. Il doit s’habituer à une nouvelle langue de travail, un nouveau poste, une nouvelle équipe, tout en soupirant peut-être que sa femme se sente seule. Je vous dis ceci car les épouses d’expats tendant parfois à penser que «lui» a le rôle facile, il part le matin au travail (lui il travaille) fait des rencontres stimulantes et de plus rentre tranquillement où tout l’attend…
Le malentendu peut s’introduire dans les deux sens et créer une confusion de sentiments ainsi qu’un début de solitude au sein du couple. Je me permets donc de vous encourager à partager rapidement vos sentiments d’anxiété, et de désoeuvrement légitimes avec votre époux. J’imagine que vous faites bonne figure devant lui et vos enfants mais le danger est que vous jouiez trop bien le jeu. En expatriation tout particulièrement il faut apprendre à partager encore plus qu’avant son intimité, en échangeant les découvertes et les doutes personnels, les bons moments où tout semble se déclencher et les frustrations soudaines. Votre époux ne peut imaginer la colère contre un four qui chauffe trop où la perte de temps à chercher la piscine en passant 30 minutes à tourner en rond en voiture !
L’isolement au sein d’une expatriation existe car après la lune de miel des premières semaines, on se retrouve 3- 5 semaines plus tard plongée dans la réalité d’une vie inconnue et déconcertante. Il existe une Association pour Francophones dans le Westchester et à Manhattan. Le plus simple est de vous inscrire au « Westchester Acceuil ». Ceci vous permettra de rencontrer rapidement d’autres nouvelles arrivées et profiter de l’expérience des plus anciennes. Ce groupe est un excellent point de départ et offre de nombreux clubs pour rencontrer et échanger de bonnes recettes de compréhension.
Soyez patiente Marlène, admettez- vous que ce changement est un choc à la fois culturel et psychologique. Croyez moi vous n’êtes pas la première ni la dernière à crier « au secours ».
Pour poser vos questions à Vivian : [email protected]