Le Jardin à l’Ouest ferme ses portes après plus de quarante ans de bons et loyaux services dans l’Upper West Side.
Quand il a ouvert en 1972 sur la 83th et Amsterdam Avenue, cette crèche-maternelle offrant un programme d’immersion en langue française faisait face à une « maison de prostitution » raconte Dominique Bordereaux, la co-fondatrice du centre avec son mari John Arden Hiigli, qui partent tous les deux à la retraite. « Il n’y avait que des artistes qui venaient s’aventurer dans ce quartier, il fallait avoir de l’audace ! » Pourtant, l’expérience a très vite été une réussite, consacrée par un article du New York Times en 1978. Et elle a même attiré l’œil de John Lennon. « Nous n’avons pas pu accueillir son fils Sean pour des raisons de sécurité » sourit-elle.
Le Jardin était précurseur pour l’époque. « John a des croyances très fermes là-dessus, il pense que l’éducation et l’art ne peuvent pas être dissociés. L’art et l’étude des langues, c’était la colonne vertébrale de notre programme » déclare Dominique Bordereaux. Le couple a été formé à la méthode d’éducation Bank Street. « C’est une méthode beaucoup plus démocratique que le système européen. Bank Street place davantage d’importance sur l’individu. (…) La formation française, c’est d’abord d’enseigner pour les meilleurs élèves du groupe, et ceux qui ne peuvent pas suivre, c’est tant pis.»
Après plus de quarante ans à New York, la France reste toujours chère à Dominique Bordereaux. Son plus grand regret est d’ailleurs de ne pas avoir plus parlé sa langue natale avec sa fille qu’elle estime plus américaine que française.
Après la fermeture du Jardin la semaine prochaine, le couple a l’intention de prendre une année sabbatique avant de renouer avec ce qui a fait leur succès : l’art pour John Arden Hiigli, dans le cadre de collaborations avec d’autres écoles, et l’éducation pour Dominique Bordereaux, qui souhaite mettre son expérience au service des maternelles francophones d’Afrique de l’Ouest. Elle va d’ailleurs faire une donation de matériel à une école du Burkina Faso.
Leurs conseils à ceux qui voudraient se lancer dans l’aventure d’un family day care ? Pour John Arden Hiigli, « il faut apprendre des enfants et garder l’esprit ouvert ». Sa femme pense qu’« il ne faut pas avoir peur de faire des erreurs. Et ne pas hésiter à expérimenter ».