« Accrocheur », « Une étude de caractère acide », « du Agatha Christie de supermarché » ou encore une série qui « se vautre dans le glamour factice et le real estate porn »… Sans aucun doute, les avis sont très partagés sur la série américaine Netflix du moment, « The Perfect Couple », qui ne laisse pas indifférent. Déjà parce qu’à l’affiche, le casting est très vendeur : Nicole Kidman en romancière à succès qui pond ses proses aussi rapidement qu’une Amélie Nothomb pour subvenir au train de vie fastidieux de sa famille. Son mari, l’excellent Liev Schreiber, en époux coureur mais amoureux de sa femme, un verre de whisky dans une main et son joint dans l’autre. Mais aussi Dakota Fanning, en bru arriviste et désenchantée, enceinte jusqu’au cou d’un futur héritier. Et Megann Fahy, la blonde sculpturale qui nous avait déjà épaté dans « The White Lotus ».
L’histoire, tirée du best-seller éponyme d’Elin Hilderbrand, commence comme un banal thriller : le fils Winbury s’apprête à se marier en grande pompe avec Amelia, moins bien née que lui, dans le décor somptueux du manoir familial sur l’île de Nantucket, dans la Nouvelle-Angleterre. Mais l’événement se termine en catastrophe avant même d’avoir commencé quand un corps est découvert dans le port, quelques heures seulement avant la cérémonie. Tous les invités deviennent soudainement suspects.
Ce scénario à la Agatha Christie donne l’occasion de développer les personnages, qui ont, sans surprise, beaucoup de choses à cacher. Derrière le décor renversant d’un manoir immense en bord de mer et relié par un seul ferry au continent, les membres et amis de cette famille très « WASP » ( White Anglo Saxon Protestant) se découvrent, grâce au travail de deux policiers aguerris et pugnaces (Donna Lynne Champlin et Michael Beach, très juste en flic Noir au milieu de ces puissants Blancs).
Mais surtout, dès le premier épisode apparaît une icône française inattendue : Isabelle Adjani. L’actrice campe le rôle d’Isabelle Nallet, une amie de la famille, personnage secondaire mais qui reste omniprésent jusqu’à l’une des dernières scènes. Elle est drôle en Française d’un certain âge mais encore dévergondée, et qui mène une vie sexuelle débridée. Elle croque le fils Winbury qui s’apprête à devenir papa, sans oublier de lui mentionner qu’elle a aussi bien connu son père. Elle contribue à maintenir auprès des Américains le mythe des Françaises mondaines, stylées aux mœurs légères.
À chacune de ses scènes, Isabelle Adjani apparaît en tenue de soirée, ne fait pas grand cas de la gravité de la situation, marmonne des mots en français lorsqu’elle ne trouve pas leur traduction, davantage préoccupée par son verre de Sancerre et sa prochaine conquête que par ce qu’il se passe autour d’elle. Elle est pourtant très émouvante lorsqu’elle murmure à propos de la victime : « Elle est simplement une jeune fille stupide amoureuse », le regard dans le vague sur sa propre vie.
Certes, la série n’affiche pas la complexité, l’analyse sociologique au vitriol ni la qualité des dialogues de « The White Lotus ». Les personnages sont plus caricaturaux mais très bien joués, et grâce au décor de rêve et à la surprise d’une Isabelle Adjani rafraîchissante, nous avons pris plaisir à la binge-watcher !