“Attends deux secondes! Je suis au milieu des oies et ça fait du bruit.” Interviewer The Inspector Cluzo peut s’avérer acrobatique. Propriétaires d’une ferme en Gascogne, Laurent Lacrouts et Mathieu Jourdain sont éleveurs et producteurs. Ils élèvent des canards et des oies. Le samedi matin, au marché Mont-de-Marsan, ce ne sont pas des CDs qu’ils vendent, mais du foie gras, du confit et des rillettes. Celles de leurs ancêtres.
Le 13 mars, changement de décor. Le duo sera en concert au Texas pour ouvrir le French Cultures Festival à Houston et participer à South By South West à Austin notamment. “Pour nous, jouer aux Etats-Unis, c’est comme proposer à un rugbyman gascon d’aller jouer en Nouvelle-Zélande. C’est une reconnaissance” , confie Laurent Lacrouts, le chanteur du groupe.
Rockeurs au coeur gascon, Laurent Lacrouts et Mathieu Jourdain ont joué dans 44 pays depuis la création du groupe en 2008. Ils parlent gascon à la ferme, français pour philosopher, espagnol pour faire de la politique. Et anglais pour le rock. “Musicalement, les Etats-Unis représentent tout pour nous. Nous respectons les cultures donc c’est important de chanter en anglais sur du rock” .
Leur succès n’est pas le fruit du hasard. En live, le duo envoie du pâté. C’est leur marque de fabrique. Ils y mettent du coeur, comme dans leurs rillettes. “On essaie de travailler sur le goût, dans notre musique comme dans nos produits”, glisse Laurent Lacrouts.
Le groupe est son propre manager. Les deux amis organisent leurs concerts, leur communication et ont créé leur propre label. Un “Do it yourself” musical que leurs fans apprécient et soutiennent. “Pour la promo, on a très vite compris qu’il fallait que les fans soient vraiment impliqués.” Les blogs et les médias sociaux, tenus par leurs supporteurs, sont leurs relais à l’étranger du Japon à l’Afrique du Sud. Un Taïwanais assure ainsi le graphisme de leurs produits musicaux et agricoles.
Prévu pour novembre 2015, un documentaire, “Rock Farmers”, raconte leur vie. “On est debout à 6 heures du mat’ pour gaver les oies, puis on gère notre groupe le matin – avec la Corée, l’Inde, les Etats-Unis, etc. L’après-midi, on va à la ferme.”
Une indépendance qui ne gave pas que les oies. “Parfois, il y a des échecs, notamment en France.” Où les deux mousquetaires ne sont pas les bienvenus, selon eux, après avoir critiqué ouvertement l’organisation des grands festivals français. “Sur les gros festivals, les programmateurs sont des tourneurs qui font passer leurs propres groupes. Et ce, alors que les festivals sont subventionnés.”
Ils envisagent une nouvelle tournée chez l’Oncle Sam en avril 2016 après la sortie de “Rock Farmers”, leur prochain album, prévue en novembre 2015. “Pour nous, aller aux Etats-Unis, c’est retourner aux sources. Mais c’est aussi aller se confronter à une concurrence très forte. C’est comme si des Chinois venaient en France et nous disaient: ‘Mon foie gras, il est meilleur que le vôtre!’ “