Comment devenir millionaire en deux ans ? Demandez à Pierre Valade et Jérémy Le Van, les deux fondateurs, respectivement français et belge, de Sunrise.
Leur calendrier pour mobile, lancé à New York début 2013, a été acquis par Microsoft – la firme l’a annoncé le 11 février. Officieusement, pour 100 millions de dollars.
Qu’est ce que Microsoft a acheté pour ce prix ? Une application calendrier (pour iOS et Android) joliment “designée”, qui intègre les données de différentes interfaces (boites e-mails, cloud, réseaux), utilisée par 500.000 personnes et sans business model – Sunrise, gratuit, ne génère aucun revenu. Ainsi qu’une équipe de 12 personnes, basée entre Paris et New York.
Nous avions rencontré Pierre Valade et Jérémy Le Van il y a un an – à l’époque, la start-up de cet ingénieur des Ponts-et-Chaussée occupait un petit local près d’Union Square. Depuis, l’équipe a emménagé dans des bureaux trois fois plus grands, sur Broadway. Il y a de la place pour une table de ping-pong, une salle de réunion vitrée, et des tables pour travailler debout.
“On prévoit de prendre un espace supplémentaire juste à côté. Nous sommes en phase de recrutement”, indique Pierre Valade, 28 ans et désormais barbu, qui estime que son équipe aura doublé sa taille d’ici fin 2015. Il n’est pas question, donc, de s’installer à Redmond, le siège de Microsoft, dans l’Etat de Washington.
Le rachat de Sunrise semble en phase avec la nouvelle stratégie de Microsoft. Le nouveau patron Satya Nadella, arrivé il y a un an, pousse vers plus de mobile, plus de design, plus de cloud – des domaines où Microsoft a pris un train de retard. L’année dernière, Microsoft a racheté Accompli, une start-up qui avait conçu une application de boîte e-mail, qui lui a permis de lancer Outlook pour mobile. “On avait eu le pré-sentiment que Microsoft allait nous racheter, car ils étaient en retard sur le mobile. On a commencé à discuter en septembre dernier. On avait eu quelques autres discussions avec d’autres entreprises, mais rien de sérieux”, raconte Pierre Valade.
Le montant payé par Microsoft peut paraitre vertigineux. De quoi mettre Pierre Valade et Jérémy Le Van à l’abri du besoin pendant longtemps. Que vont-il faire de ces millions ? Les deux fondateurs sont très discrets. “On veut rester nous-même. La beauté, dans tout cela, c’est de garder nos amis, nos employés. C’est cela l’important”, affirme Jérémy Le Van, 30 ans, en charge plus particulièrement du design de Sunrise.
La somme payée par Microsoft, en tout cas, n’étonne pas Fabrice Grinda. Cet investisseur français basé à New York a injecté quelques milliers de dollars dans Sunrise tout au début 2013, dans des conditions favorables. Pour lui, c’est une excellente affaire.
“Ce n’est pas surprenant que Microsoft mette 100 millions. Sunrise a une vraie base d’utilisateurs, et cela va très bien dans leur stratégie”, remarque-t-il. “Il faut se demander combien cela aurait coûté à Microsoft pour arriver au même point en interne. Pour Sunrise, aussi, c’est une bonne opération. Ils n’avaient pas levé trop d’argent, donc ce prix était susceptible d’intéresser les actionnaires et les fondateurs. C’était le bon juste milieu.”
Outre les premiers soutiens que la start-up avait reçus auprès d’angels investors, Sunrise a levé 2,2 million de dollars en juin 2013, puis six millions de dollars en juillet dernier, auprès de différents fonds.
Fabrice Grinda a en tout cas eu le flair de miser sur le bon cheval. “Quand j’ai investi, Pierre venait de commencer. Ce qui m’a séduit, c’est qu’il avait une vision de son produit très intéressante. Je voyais que son calendrier suscitait un certain enthousiasme. J’ai utilisé Sunrise, j’ai adoré”, affirme-t-il.
La “vision” de ce que devait être un bon calendrier, c’est ce qui a séduit Ilan Abehassera, un autre investisseur français de la première heure, lui aussi basé à New York. “Je connaissais Pierre depuis longtemps. Quand il travaillait chez Foursquare, il avait développé sur le côté un service d’e-mails, qui vous disait tous les matins ce qui allait se passer dans votre journée. Lorsqu’il m’a montré Sunrise, j’ai tout de suite eu confiance. Ce que Sunrise sait très bien faire, c’est le design, le détail. Bref, Sunrise est très bon dans ce qu’on appelle l’expérience utilisateur. Il y a des tas d’autres calendriers pour mobile, mais le leur est celui qui est le plus satisfaisant, le plus agréable”, analyse Ilan Abehassera.
Sous le drapeau Microsoft, Pierre Valade et Jérémy Le Van vont continuer à développer Sunrise, qui devrait garder son nom et rester gratuit. “On fait partie de Microsoft, certes, mais nos procédés sont très différents d’une boite de 120 000 personnes ! Microsoft a acheté un produit, mais aussi une méthodologie de travail, et nous souhaitons la conserver”, glisse Jérémy Le Van.
Ave plus de moyens, l’équipe Sunrise compte mettre au point de nouvelles fonctionnalités. Intégration automatique des tickets d’avion ou de concert, réveil intelligent… Pierre Valade ne manque pas d’idées. “L’objectif, c’est que le calendrier soit la représentation la plus fidèle de votre journée.”
0 Responses
“Il faut se demander combien ça aurait coûté en interne ?”
Certainement pas 100 millions… Come on.