Lorsqu’il a co-fondé Tech Adaptika en décembre dernier, Hosni Zaouali jouait le long terme: un pari sur la révolution digitale de l’enseignement, à un horizon de dix ans au moins. Mais ça c’était en décembre. Depuis le coronavirus est apparu et l’entrepreneur ne dort plus beaucoup.
“Nous avons multiplié par 10 le nombre de clients; nos effectifs sont passés d’une poignée à près de 50 personnes…” raconte le franco-tunisien, désormais basé à Toronto et San Francisco. C’est que l’offre de Tech Adaptika tombe à pic pour les universités américaines, désespérément à la recherche de solutions pour l’enseignement à distance. “La Covid a tout changé, observe Hosni Zaouali. Les universités ont d’abord transféré leurs cours en ligne quand il leur a fallu fermer les campus en mars, avant de se rendre compte que ça ne marche pas: émotionnellement c’est épuisant de regarder quelqu’un en Zoom… Du coup, elles sont venues nous voir pour trouver des solutions pour vraiment réimaginer leur offre”.
Car le projet de Tech Adaptika est d’offrir un véritable “campus virtuel” qui permet aux étudiants de reproduire en ligne les bénéfices de la vie sur un campus: travail collaboratif, rencontres avec professeurs et élèves, évènements, etc… “C’est le mariage de la réalité virtuelle et d’un outil de “learning management system””. Plus qu’une plateforme, Tech Adaptika veut vendre son expertise du “comportement en ligne”: “nous avons analysé les émotions des enseignants et des élèves en ligne et constaté que les Zoom et autres Skype sont trop à sens unique (on écoute seulement); nos campus virtuels ont donc pour objet de multiplier les points de contacts”.
Si les universités américaines et les grandes entreprises -qui toutes souhaitent créer des campus virtuels pour leurs formations internes- sont devenues le focus de Tech Adaptika, ce n’était pas nécessairement l’objectif de Hosni Zaouali au départ. Convaincu que “l’éducation peut changer le monde”, il visait d’abord l’Afrique, fort de son expérience précédente sur le continent, où il a créé des écoles virtuelles. Une expérience qui l’a ensuite conduit à travailler pour l’université de Stanford, où il avait étudié et qui l’a rappelé en 2018 pour devenir consultant et mettre en place un “executive program” en ligne. “L’Afrique reste un objectif à moyen terme, mais la Covid a changé les choses à court terme. Il y a beaucoup d’opportunités à saisir ici (en Amérique du Nord) et l’objectif est maintenant de grossir rapidement pour accompagner les changements importants qui vont avoir lieu dans l’éducation supérieure”. Déjà rentable, l’entreprise souhaite faire entrer des investisseurs pour booster sa croissance “et rapidement atteindre les 3.000 employés”.
Le marché, dit-il, est considérable: “une université comme Stanford a 7.000 étudiants en “undergrad”; en ligne ils peuvent grossir beaucoup plus, attirer des étudiants du monde entier, et c’est le cas de toutes les universités de 1er rang. Pour les autres, s’ouvre une période d’incertitude, avec des étudiants de moins en moins prêts à payer des sommes considérables, surtout pour être en ligne- celles-là vont perdre jusqu’à 30% de leurs étudiants si elles n’adaptent pas leur offre virtuelle. La Covid va être un accélérateur de changement formidable, auquel nous voulons contribuer”.