Qui s’en souvient ? Il fut un temps où Paris était le paradis des artistes. Une exposition à New York va justement s’intéresser à la période de l’après deuxième guerre mondiale durant laquelle la capitale française représentait le refuge de nombreuses figures américaines. Intitulée sobrement « Americans in Paris, Artists working in Postwar France », l’exposition ouvrira le samedi 2 mars et inaugurera les nouveaux locaux de la Grey Art Gallery, galerie historique de la NYU (New York University) qui approche du demi-siècle. Fondée en 1975, ce lieu emblématique de l’art dans la Grosse Pomme investira un espace bien plus vaste, situé 18 Cooper Square (Noho) et sera renommé Grey Art Museum.
« En travaillant sur l’une de nos précédentes expositions, Inventing Downtown, on s’est rendu compte que plusieurs artistes avaient passé du temps à Paris, explique Lynn Gumpert, la directrice du Grey Art. J’ai toujours été intéressée par les liens entre la France et les États-Unis. On a commencé à en discuter entre nous, et on a réalisé qu’on pouvait citer un très grand nombre d’artistes dans le même cas. » Nait alors l’idée d’une exposition consacrée à ce thème.
Pour éviter le trop-plein, Lynn Gumpert et Debra Balken, en charge de l’exposition, ont décidé de restreindra la sélection à une période donnée (1946-1962), aux artistes découvrant la France à ce moment-là et ayant vécu à Paris au moins un an. « Donald Trump venait d’être élu et on pensait que de nombreux artistes allaient fuir à nouveau », relève Lynn Gumpert. L’exposition présente le travail de 70 artistes à travers plus de 130 peintures, sculptures, photos, vidéos, et mêmes textiles.
« Nous avons voulu montrer la diversité des styles, appuie Debra Balken, une spécialiste de l’art contemporain américain. Dans cette période de l’après guerre, l’abstraction et la forme figurative étaient toujours très présentes. »
Dans la foulée d’une scène littéraire très vivante dans la capitale française, que vient de rejoindre l’écrivain James Baldwin, c’est toute une communauté américaine qui se retrouve dans la chaleur des restaurants parisiens et le coût très modéré de la vie en France. « On était dans un contexte d’après-guerre, de nombreux hôtels étaient vides, on pouvait y dormir à 1 dollar la nuit, racontent les deux conservatrices. La culture du café comme lieu était également très importante : les artistes s’y retrouvaient, ils pouvaient y échanger, et surtout ils y bénéficiaient du chauffage, alors que leurs chambres, bien souvent, ne l’étaient pas. »
Ironiquement, au moment où s’ouvre cette exposition, New York semble avoir désormais remplacé Paris au panthéon des artistes. C’est dans la Grosse Pomme que se réfugient les créateurs, nourris par les nombreuses possibilités et l’effervescence de la mégalopole. « C’est vrai que New York a un peu ce statut-là désormais, mais Paris est toujours actif sur le monde de l’art, précise Lynn Gumpert. De nombreux artistes y ont déménagé dans la foulée du Brexit. Paris est une des plus belles villes du monde et les artistes sont des personnes très visuelles, pour qui l’environnement optique est très important ». Paris sera toujours Paris…
Americans in Paris: Artists Working in Postwar France, 1946–1962 à la Grey Art Museum (ex-Grey Art Gallery), 18 Cooper Square. Du 2 mars au 20 juillet. Informations ici