Plus de 70 personnes se serrent dans l’étroite bibliothèque du Lycée Français de San Francisco, prêtes à participer au Grand débat national.
Cette discussion est la première (et la seule à ce jour) à avoir été montée aux Etats-Unis dans le cadre de la grande discussion voulue par Emmanuel Macron pour répondre à la crise des Gilets jaunes. Organisé vendredi 25 janvier par Sophie Suberville, vice-présidente du conseil consulaire de San Francisco et membre de La République en marche, le débat est animé par la psychologue Gwladys Louis-Marie et par la journaliste Janis Couvreux.
Fiscalité, dépenses publiques, transition écologique: le temps manque pour aborder tous les thèmes. Sur la fiscalité, les participants au débat réclament plus de transparence sur la justification et la redistribution des impôts: “Sur un même formulaire, on trouve pêle-mêle les cotisations sociales et la taxe audiovisuelle”, déplore Romain Pirracchio, professeur de médecine à UCSF. “On pourrait réorganiser la feuille d’impôt par secteur, comme l’éducation, la santé, la défense par exemple.” Pierre Adida, retraité, pointe du doigt le nombre de sénateurs et de députés en France, “aberrant” quand on le compare à celui, beaucoup plus modeste, des Etats-Unis.
Appelés à réfléchir sur les domaines où faire des économies, une réponse fuse du fond de la salle: “Il faut tout digitaliser et supprimer les fonctionnaires!“. Des rires répondent à cette provocation, mais la discussion continue sur la nécessité d’une meilleure efficacité de l’administration, comparée à “un mille-feuille“.
Tous s’accordent aussi sur une perte de confiance en l’Etat quand il s’agit de faire les bons choix en termes de dépenses. S’inspirant de son expérience de citoyen américain, un participant souligne que le système américain repose bien plus sur des initiatives citoyennes que la France: “On vote sur différentes propositions liées à la ville, le comté et l’Etat de Californie; les propositions sont très concrètes, bien expliquées dans des fascicules que chacun peut lire, et émanent souvent de citoyens.”
Sur la question de la transition écologique, la question de la transparence se pose encore: “On met sur la table des objectifs pour la planète que personne ne peut contester, mais qui se traduisent par une taxe sur le diesel qui a été mal expliquée, explique Romain Pirracchio. Il faut que l’impôt soit intégralement utilisé pour financer la transition écologique, pour le bénéfice de tous.”
Un jeune étudiant se lève pour dénoncer les pollueurs: “On demande aux gens de trier leurs déchets, mais on ne dit rien des entreprises qui ont délocalisé et dont on importe les produits sur des porte-containers très polluants. C’est un changement sociétal qu’il nous faut!” Des applaudissements saluent son discours. “On flique le petit contribuable, mais on ferme les yeux sur les gros pollueurs, et ceux qui font de l’évasion fiscale“, poursuit-il.
Roland Lescure, député des Français de l’étranger et qui a fait le déplacement à San Francisco, est invité à conclure le débat. “Les Français expatriés apportent de nouvelles idées, et j’ai d’ailleurs pris plein de notes durant cette discussion. Je retiens surtout le besoin évident de transparence, tant sur la fiscalité que sur la transition écologique, ainsi qu’une meilleure pédagogie.”
Selon le député, d’autres débats devraient être organisés prochainement à New York, Atlanta ou Montréal. “Chacun peut organiser un débat, et les consulats sont là pour aider à l’organiser“, rappelle-t-il. Le grand débat national se clôturera le 15 mars, et chacun peut soumettre ses idées directement sur le site dédié.