(Article partenaire) Les nouvelles filiations telles que la GPA (gestation pour autrui) et la PMA (procréation médicalement assistée), ou encore l’ouverture de l’adoption aux couples homosexuels font naître de nombreuses interrogations sur le plan juridique, a fortiori dans un contexte international.
Un point s’impose sur les principales questions qui peuvent se poser aux parents ou futurs parents ayant des liens avec New York et la France.
En France comme à New York, la filiation est principalement établie par l’acte de naissance ou la reconnaissance par l’un des parents. Cette dernière peut être préalable à la naissance en France mais ne peut qu’être postérieure à la naissance à New York. Le lien de filiation a des conséquences juridiques primordiales, il crée des droits et devoirs réciproques entre parents et enfant, notamment le droit de porter le nom, le droit d’hériter, le droit d’exercer l’autorité parentale sur l’enfant mineur. Il permet également de transmettre la nationalité, ce qui est particulièrement intéressant pour les parents ayant des liens avec la France et les Etats-Unis. D’un point de vue biologique, un enfant ne peut avoir que deux liens de filiation, l’un paternel et l’autre maternel. Avec l’apparition de la GPA et de la PMA se pose la question de la possibilité d’établir un acte de naissance ou un acte de reconnaissance ne correspondant pas au lien biologique.
La GPA est contraire à l’ordre public et strictement interdite. En cas de recours illégal, aucun lien de filiation ne pourra être établi, y compris à l’égard du père biologique, et des poursuites pénales seront encourues..
Quant aux GPA réalisées à l’étranger, la France leur refusait initialement tout effet, y compris en terme d’établissement de la filiation. Il était donc impossible de faire transcrire sur les registres de l’état civil français l’acte de naissance d’un enfant né à l’étranger à l’issue d’une GPA. Cependant, la multiplication du nombre d’enfants nés de GPA à l’étranger, et plusieurs condamnations de la cour européenne des droits de l’homme ont conduit les juridictions françaises à assouplir leur position, notamment en 2015 et 2017.
Actuellement, la Cour de Cassation accepte la transcription de l’acte de naissance d’un enfant né d’une GPA à l’étranger lorsqu’il correspond à la réalité biologique.
Ainsi, si l’acte de naissance étranger mentionne le père biologique et la mère biologique ayant porté l’enfant, la France acceptera sa transcription. En revanche, si la mère sur l’acte d’état civil étranger est la mère d’intention et non la mère ayant porté l’enfant et accouché, seule la filiation paternelle sera reconnue par l’état civil français.
L’autre parent d’intention pourra alors adopter l’enfant de son conjoint, par l’intermédiaire d’une procédure française simplifiée mais ouverte aux seuls couples mariés. Toutefois, la procédure de l’adoption intrafamiliale présente des limites, notamment liées au fait qu’elle reste soumise à l’accord du parent légal, qui peut toujours se raviser, en cas de séparation ou par la force des choses, de décès. Ainsi, la Cour d’appel de Paris a accepté, par un arrêt du 18 septembre 2018, que le parent d’intention adopte l’enfant, mais aux conditions traditionnelles de l’adoption plénière, à savoir : aucun lien avec le parent biologique renonçant (la mère porteuse), l’accord du parent biologique/conjoint, et le mariage.
Bien que la Cour européenne des droits de l’homme ait validé cette position par avis du 10 avril 2019, une évolution est à prévoir. En effet, le Tribunal de Grande Instance de Nantes, compétent pour la transcription des actes de naissance étrangers, fait de la résistance et a accepté, en 2019, la transcription d’un acte de naissance étranger mentionnant la mère d’intention, sans que cette dernière n’ait à passer par le processus de l’adoption; un recours est à prévoir. La question reste également en débat en France dans le cadre de la révision à venir de la loi de bioéthique.
Le comité national d’éthique reste opposé à l’admission de la GPA sur le territoire français, mais les questions suivantes restent en suspens concernant les GPA pratiquées à l’étranger :
– Que faire si la mère d’intention est bien la mère génétique de l’enfant même si elle ne l’a pas porté?
– Doit-on ouvrir la procédure d’adoption simplifiée de l’enfant du conjoint aux couples non mariés?
En l’absence de réglementation de la GPA (« surrogacy ») au niveau fédéral, la réglementation diffère en fonction des États. Cependant, le Uniform Parentage Act de 2017 prévoit un cadre uniforme admettant la GPA. Celui-ci peut être adopté par les Etats ou, du moins, orienter leur réglementation. La Californie, par exemple, l’a adopté et admet la GPA sur son territoire.
À New York, la GPA est autorisée tant pour les couples que pour une personne seule à la condition qu’elle soit « compassionate » c’est à dire que les fonds versés à la mère porteuse correspondent uniquement à la prise en charge de ses frais et non à une véritable rémunération. La procédure à suivre diffère en fonction du lien génétique de la mère porteuse avec l’enfant, mais également en fonction de son statut marital.
Si la mère porteuse n’est pas mariée, le père biologique peut être mentionné directement sur l’acte de naissance. Quant à la mère d’intention, elle devra entreprendre une procédure, dont la nature dépendra selon que la mère porteuse aura un lien génétique avec l’enfant (“traditional surrogacy”: il s’agira alors d’une adoption) ou non (“gestational surrogacy”: établissement de la filiation avec les parents d’intention par l’intermédiaire d’une décision de justice permettant l’obtention d’un nouvel acte de naissance portant mention des deux parents d’intention).
À l’inverse, si la mère porteuse est mariée, son conjoint doit renoncer à ses droits parentaux en préalable (“termination of parental rights”) et l’acte de naissance de l’enfant ne pourra pas mentionner le nom du père biologique dès la naissance.
En toute hypothèse, les GPA pratiquées dans les autres Etats sont reconnues sans difficulté à New York.
La PMA est actuellement ouverte aux seuls couples hétérosexuels infertiles et doit être gratuite. Dans le cadre de la révision de la loi bioéthique censée intervenir en 2019, l’ouverture de la PMA aux couples de femmes et aux femmes célibataires est prévue. Les PMA pratiquées à l’étranger sont susceptibles d’être reconnues en France et l’adoption d’un enfant né d’une PMA est ouverte au conjoint.
La PMA est ouverte à tous et payante (« reasonable compensation ») et pour les couples homosexuels, le nom des deux mères peut être inscrit sur l’acte de naissance si elles sont mariées. À défaut, une procédure d’adoption doit être entreprise (« second parent adoption »).
Il faut indiquer que les Etats-Unis et la France sont membres de la conférence de la Haye, laquelle mène actuellement des travaux permettant l’adoption d’une position commune sur la GPA et la PMA.
L’adoption est ouverte aux couples homosexuels mariés depuis le 17 mai 2013, date à laquelle le mariage homosexuel a été reconnu en France. L’époux de même sexe que le parent biologique d’un enfant peut adopter cet enfant, si la filiation de ce dernier n’est pas établie à l’égard de son second parent biologique. Depuis un arrêt de la Cour de Cassation du 5 juillet 2017, l’adoption est également ouverte, comme évoqué ci-dessus, aux couples ayant eu recours à la PMA ou la GPA.
L’existence d’un mariage est une condition pour l’instant maintenue, mais l’ouverture aux couples non mariés est à envisager dans l’avenir, au regard de la position récente de la Cour européenne des droits de l’homme.
À l’exception de l’adoption par le beau-parent (“step-parent adoption”) ou par le concubin du parent notamment, l’adoption met fin aux droits et responsabilités du parent biologique sur l’enfant et ses biens. Elle est ouverte aux couples, hétérosexuels ou homosexuels, mariés ou non, et aux personnes célibataires.
Si l’adoption était traditionnellement « closed », l’enfant n’ayant aucun lien avec ses parents biologiques, depuis les années 1980, les juridictions américaines, et new-yorkaises en particulier, valident l’«open adoption», processus permettant aux parents biologiques de garder un lien affectif avec leur enfant, par des échanges avec les parents adoptifs et/ou des visites auprès des enfants, selon les termes du contrat conclu entre les « parents ».
La Convention de la Haye du 29 mai 1993 :
Les Etats-Unis et la France ont ratifié une convention internationale permettant la reconnaissance automatique des décisions d’adoption prononcées par un état membre dans l’autre. Il faut veiller à respecter en préalable de l’adoption les conditions et la procédure prescrites par cette convention qui met en place un mécanisme de collaboration entre autorités centrales. À défaut, il faut être particulièrement vigilant sur les adoptions prononcées aux Etats-Unis.
En effet, il est fréquent que les adoptions prononcées aux Etats-Unis soient « open » et ne rompent pas le lien avec les parents biologiques. En conséquence, elles risquent de ne pas être reconnues en France comme adoptions « plénières », seule possibilité de transmettre la nationalité.
En conclusion, il est vivement recommandé d’envisager toutes les conséquences juridiques sur la filiation ou les liens avec un enfant avant tout projet de GPA, PMA, ou d’adoption, a fortiori dans un contexte mêlant l’ordre juridique français et new-yorkais.
Pour en savoir plus et bénéficier de conseils d’experts, contactez Hélène Carvallo et Anne-Carole Plaçais, avocates aux barreaux de New York et Paris, spécialisées en droit international de la famille.
—————-
Note: les “articles partenaires” ne sont pas des articles de la rédaction de French Morning. Ils sont fournis par ou écrits sur commande d’un annonceur qui en détermine le contenu.