« Ça a été le parcours du combattant », confie Gérard Bertrand, le sourire aux lèvres. Mais l’ancien rugbyman professionnel a su marquer et transformer l’essai.
Le jeu en valait la chandelle : les Etats-Unis sont devenus le premier marché d’exportation au monde des vins Gérard Bertrand. Cette année, 2.400.000 bouteilles vont être vendues et distribuées dans 50 états américains. Ses “vins du Sud” affichent une croissance insolente de 50% par rapport à l’année dernière.
Pourtant, ce pays a d’abord été une « énigme » pour le vigneron du Languedoc. « J’ai eu trois ou quatre importateurs différents mais personne n’a eu du succès. La région Languedoc-Roussillon n’était pas la plus facile à vendre à l’époque. Les gens étaient focalisés sur le Bordeaux, la Bourgogne. »
Mais l’homme n’est pas du genre à se laisser abattre. “Je suis arrivé aux Etats-Unis il y a sept ans. J’ai fait le tour des principaux importateurs. Comme nous avions été élus ‘Best value winerie’ par le magazine américain Wine Spectator, je me suis dit : ils vont te dérouler le tapis rouge. Nous étions en 2008, en pleine crise des subprimes, et on n’a trouvé personne. Je me suis alors dit : si personne ne veut importer mes vins alors je vais les importer moi-même. J’ai créé ma société d’importation, et je suis allé voir les distributeurs. Ce qui m’a permis d’avoir accès directement au marché.”
Gérard Bertrand se rend désormais aux Etats-Unis toutes les six semaines. Pour ce Narbonnais, très attaché à ses racines, le marché américain est passionnant. « Il est très premium, les gens ne veulent que des vins de qualité. C’est un marché qui a beaucoup de connaissances, et c’est rare dans le monde. »
Un marché idéal, selon lui, pour réussir son objectif : donner du cachet à la catégorie des “vins du Sud de la France”, et rivaliser avec les meilleurs vins du monde. « On est en train de réussir le challenge », assure-t-il de son accent chantant. « Le Languedoc est la seule région dans le monde où l’on peut faire du rosé, du blanc, du rouge, de la biodynamie, des vins sans sulfites, des vins doux naturels… »
Un portefeuille unique, que Gérard Bertrand entend bien imposer à l’échelle planétaire. Philosophe et fonceur, il a toujours vu grand. « Quand j’ai commencé à travailler, j’avais quatre personnes et on vendait 200.000 bouteilles. Maintenant, j’ai 250 personnes et on fait 20 millions de bouteilles dans le monde. J’avais une propriété de 60 hectares, et aujourd’hui on en a 600, et 11 propriétés. »
Aux Etats-Unis, Gérard Bertrand a su doucement mais sûrement tisser sa toile. Il a démarré dans quatre états, avec en tout et pour tout un salarié. Les vins du Languedoc sont désormais présents dans tout le pays, et dix personnes sont dédiées au marché américain.
Mais l’homme n’aime pas « parler chiffres ». Ce passionné de nature leur préfère des métaphores lyriques. Alors quand on lui demande quels sont ses objectifs, Gérard Bertrand répond : « The sky is the limit aux Etats-Unis. Pour le moment on regarde la lune, et on n’est pas encore au niveau des étoiles. Mais on est déjà au-dessus des nuages ! »