Quand Lucie Franc de Ferrière a commencé à vendre des gâteaux pendant la pandémie, elle était loin de se douter que ce passe-temps deviendrait un temps-plein. Aujourd’hui, son business, From Lucie, est florissant dans tous les sens du terme.
Spécialisée dans la confection de gâteaux à fleurs hautement instagrammables, la Franco-Néo-Zélandaise doit s’installer dans un local d’East Village cet été. Une belle réussite pour un commerce qu’elle a démarré dans son appartement et qu’elle gère seule, malgré l’afflux de commandes. “Aujourd’hui, je suis à un point où l’image de mes gâteaux est tellement présente que cela a du sens d’ouvrir un espace pour représenter l’esprit de mon travail“, dit-elle.
La diplômée d’histoire de l’art travaillait comme commissaire au sein de la galerie Arsenal quand elle est arrivée à New York en 2018. En avril 2020, elle perd son emploi du jour au lendemain à cause de la Covid. “Comme il était rattaché à mon travail, mon visa s’est terminé de suite. On m’a dit qu’il fallait que je rentre si je ne voulais pas être en situation irrégulière. Gros stress !, se souvient-elle. J’avais des amis à New York. Ça faisait quelques temps que j’étais là. Je ne voulais pas rentrer“. Elle parvient à décrocher un visa de six mois pour rester. Le temps de “trouver de nouvelles idées“.
Un mois plus tard, son mari, Gurpreet Singh, qui avait lancé une semaine avant le confinement son café Sunday to Sunday dans le Lower East Side, ouvre une “take out window” pour vendre du café et des pâtisseries à emporter. Lucie Franc de Ferrière décide alors de mettre la main à la pâte et commence à faire pâtisseries et gâteaux au sous-sol pour les clients du café.
Un talent hérité de sa mère qui régalait de ses recettes les invités de sa chambre d’hôte et de son salon de thé au sein du chateau familial dans la campagne bordelaise. “Je passais mes journées dans la cuisine à la regarder, à l’aider à faire de la confiture dans de grandes marmites à partir de nos arbres fruitiers ! On avait aussi des oeufs qui venaient de la ferme. J’ai grandi au contact de la terre. Je voulais le rester autant que possible à New York, dit-elle. Je n’ai pas eu une formation classique de pâtisserie, mais j’ai fait l’école de la vie“.
Face aux bons retours de ses premiers clients, elle tient un point de vente éphémère à l’Essex Market et écoule plus de 200 mini-gâteaux sur un week-end. “Le premier jour, j’en avais fait vingt sans savoir si les gens allaient se pointer“. Il est vrai que ses gâteaux se remarquent de loin. Ils sont coiffés d’une ou plusieurs fleurs qui leur donnent un air artistique et rustique. Une autre inspiration provenant de sa mère. “Elle a un jardin gigantesque à la maison avec beaucoup de fleurs. Très tôt, je savais lesquelles étaient toxiques, comestibles ou pouvaient être mises sur un gâteau“, raconte celle qui reconnaît manger des pétales de rose. “Quand on passe à côté d’un gâteau sortant du four, on le sent. Même chose pour une fleur quand on marche dans un jardin. Pourquoi ne pas les mettre ensemble ?“.
Elle utilise aussi des extraits de fleurs et des herbes (rose, thym, hibiscus…) dans ses recettes, notamment pour le glaçage. “Chaque gâteau raconte une histoire. Par exemple, j’aime bien utiliser de la lavande, car cela évoque le sud-est où se trouve ma grand-mère en ce moment“, poursuit-elle.
Les fleurs sont fraîches, comestibles ou simplement décoratives. En tout cas, elles sont non-toxiques – “si quelqu’un les mange, il ne lui arrivera rien, à part que ça ne sera pas très bon !“. Elle s’attache aussi à acheter des fleurs “imparfaites”, aux tiges trop courtes par exemple, de manière à ce qu’elles ne soient pas jetées. Pour l’essentiel, elle se fournit le matin même auprès d’une fleuriste du Lower East Side où elle a ses habitudes. “Il y a des gens qui dessinent leur gâteau longtemps à l’avance. Je ne le fais pas car je ne sais pas quelles fleurs je trouverai chez la fleuriste. Je fais avec ce dont je dispose”.
Compte-tenu succès de sa petite entreprise, l’entrepreneuse doit à présent pousser les murs. Son futur local lui permettra d’avoir une cuisine dédiée avec quelques tables. Elle pourra aussi accueillir ses clients dans son propre espace. Jusqu’à présent, ils devaient aller à Sunday to Sunday pour chercher leur commande. “Je veux les rencontrer. Et ils veulent me voir aussi car ils sont curieux de mon histoire, dit-elle. Si je peux leur donner ça en les invitant dans un local qui évoque le sud de la France, alors pourquoi pas ?“.
Photo: Lucie Franc de Ferrière – Courtesy of Alex Mill / Bryan Derballa
Le site de From Lucie