Les Etats-Unis, ou plutôt “Gringolandia” comme Frida Kahlo surnommait le pays, n’avaient plus accueilli une exposition de cette ampleur consacrée à l’artiste mexicaine depuis bien longtemps. A partir du 8 février, le Brooklyn Museum présente “Les apparences peuvent être trompeuses”, une plongée dans l’univers de la talentueuse peintre au style charismatique. Iconique même.
“C’est l’une des femmes artistes les plus adorées du XXe siècle”, lance, mercredi 6 février, Anne Pasternak, la directrice du Brooklyn Museum. “Quand on voit la manière dont les Mexicains sont dépeints aux Etats-Unis, c’est maintenant qu’il faut montrer la magnifique histoire et culture de ce pays”, ajoute-t-elle, en référence au mur que Donald Trump s’échine à vouloir construire à la frontière pour éviter une “invasion” de prétendus dangereux immigrés.
L’exposition, qui contient 11 tableaux et plus de 150 photos, présente des objets personnels découverts en 2004 dans la “Casa Azul”, la maison du quartier Coyoacán à Mexico City où a vécu Frida Kahlo la majeure partie de sa vie. Des bijoux, son maquillage, sa boîte à couture… Les pièces principales sont les somptueuses tenues colorées de l’artiste et ses corsets, ornés de dessins et de miroirs, symboles de son infirmité suite à un accident de bus à l’âge de 18 ans, et de la douleur qui l’accompagna jusqu’à sa mort en 1954.
Créativité, force de caractère, engagement
Il ne s’agit pas ici de simples fétiches pour adeptes de la “Fridamania”. Ces possessions recèlent des preuves de la créativité, de la force de caractère et des engagements de l’artiste. Comme ces corsets sur lesquels elle a peint faucilles et marteaux, en référence à l’idéologie communiste qu’elle embrassait. Les élégantes jupes et chemises, très amples, étaient quant à elles choisies par Frida Kahlo pour affirmer son identité mexicaine tout en lui permettant de masquer son handicap à la jambe dû à une polio contractée à 6 ans.
De nombreuses photos présentent également une facette puissante de Frida Kahlo : une femme libre qui contrôle son image, cigarette à la main et posture déterminée, et dont la construction de l’identité dépasse les stéréotypes de genre. On la voit ainsi sur un cliché vêtue en homme lors du mariage de sa soeur. On l’observe, sur des portraits d’une grande intensité réalisés par l’un de ses nombreux amants Nickolas Muray, afficher sa pilosité faciale brute en même temps que son extrême coquetterie, gros bijoux et fleurs dans les cheveux.
Tout chez Frida Kahlo nous invite à voir au-delà des apparences. En 1933, alors qu’elle répondait à un journaliste de Detroit News, elle avait envoyé valser l’image d’épouse de Diego Rivera, célèbre peintre mexicain, qu’on essayait de lui coller. “Rivera se débrouille plutôt bien pour un petit garçon, mais c’est moi la grande artiste”, avait-elle affirmé.