François Hollande, Président. Qui l’eut cru ? Pas l’agence de presse Associated Press en tout cas, qui décrit le socialiste comme un “Accidental President” dans un article repris par plusieurs médias (dont ici par Fox News). L’étiquette n’est pas flatteuse pour le nouveau locataire de l’Elysée, mais l’organe de presse se justifie : “Il y a un an, l’idée de François Hollande devenant président de la République, aurait fait rire, même certains de ses alliés. (…) C’était avant l’affaire DSK“.
Hollande peut peut-être remercier Dominique Strauss-Kahn, mais il doit surtout son succès à Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, si l’on en croit de nombreux titres américains. Car, pour eux, c’est la politique d’austérité voulue par les deux leaders qui explique son élection. Selon le Detroit Free Press, cette dernière est un «retour de bâton» face aux politiques de rigueur de «Merkozy». «Retour de bâton» est également le terme utilisé par le Washington Post, dans un article intitulé «les électeurs grecs et français disent non à l’austérité», pour expliquer la montée en puissance du socialiste en France ainsi que l’effondrement des partis traditionnels aux élections parlementaires en Grèce, au même moment. «Avec Angela Merkel, Sarkozy le franc-parleur était l’architecte principal de la poussée européenne pour restaurer la confiance dans l’euro par une discipline fiscale dure». Dans un édito dans le New York Times, l’économiste Paul Krugman considère que les élections grecques et françaises sont avant tout des « référendums sur l’actuelle stratégie économique européenne ». Et d’ironiser : «C’était amusant de voir les apôtres de l’orthodoxie essayer de présenter Hollande le prudent et le tempéré comme une figure menaçante. ‘Il est plutôt dangereux, a déclaré The Economist, qui a observé qu’il croyait réellement dans une société plus juste. Quelle horreur (sic) ! »
La question au bout de toutes les plumes aujourd’hui est: que va-t-il se passer dans la France – et l’Europe – de François Hollande? Car pour beaucoup d’observateurs outre-Atlantique, ce dernier reste une énigme. Le socialiste est «la tortue dans la fable d’Esope» qui devra «maintenant montrer aux Français, et au monde, qu’il a des talents d’Homme d’Etat, pas simplement qu’il n’est pas Nicolas Sarkozy», souligne l’Associated Press. «Hollande a longtemps été sur la touche de la politique francaise. Des amis et collègues de longue date le comparent à un flan ou un capitaine de pédalo», poursuit l’agence. Pour tenter de comprendre à quoi pourrait ressembler une présidence Hollande, le New York Times s’est rendu à Tulle, en Corrèze, dimanche soir, où, constate la journaliste Maia de la Baume, «le président élu a plein de fans». «Lors d’interviews, les habitants de Tulle ont parlé de leur gratitude envers M. Hollande pour avoir contribué à moderniser les écoles locales, promouvoir les soins à domicile pour les personnes âgées, et avoir coupé les coûts dans un district administratif qui compte parmi les plus endettés de France ». Et de citer une fan de la première heure : « Il est toujours en train de discuter avec les gens, de leurs difficultés. Personne n’a honte de parler à François».
“Nicolas Sarkozy va manquer aux Français”
Tout le monde, pourtant, ne pense pas que la magie opérera sur la scène internationale. Selon un éditorialiste de Forbes, l’Europe entre dans un « no man’s land » avec l’élection de François Hollande. Le International Herald Tribune se demande si les «riches vont se diriger aux frontières». Dans Slate, Matthew Yglesias estime que si la « banque centrale européenne signale qu’elle ne soutiendra pas le système bancaire français et l’économie francaise si Hollande en reste au statu quo, alors il n’aura pas le choix. » Pour le site d’information économique Bloomberg BusinessWeek, «Hollande n’emmènera pas la France dans une direction radicalement différente, même si son slogan de campagne était ‘le changement, c’est maintenant’. Sa marge de manœuvre sera extrêmement limitée par la pression des marchés et la fiscalité». Même diagnostic du côté du Wall Street Journal: «François Hollande aura une lune de miel mais elle sera courte. Elle le sera encore plus s’il pense qu’il pourra raviver l’économie avec ses promesses de campagne». Le journal le compare à François Mitterrand: «Il a essayé de remplir ses promesses de campagne et a vu les marchés se révolter. Rapidement, le socialiste s’est repenti et a, par la suite, conduit quatorze années de présidence couronnées de succès. Il en sera peut-être de même pour M. Hollande s’il a la lucidité de se rendre compte des limites de l’économie dirigiste». Enfin, dans un édito publié dans le New York Times, Rosecrans Baldwin affirme que «Nicolas Sarkozy va manquer aux Français plus qu’ils ne le pensent ». « Il a transformé la présidence française, de même que la manière dont les Américains voient la France».
Obama félicite Hollande
Que vont devenir les relations franco-américaines justement ? Là encore, c’est l’incertitude qui prédomine dans les colonnes de la presse américaine. Notant que le S&P 500 a accusé vendredi sa plus forte baisse de la semaine en anticipation de l’élection d’un « socialist » à la place de « l’un des présidents les plus pro-Américains depuis des décennies », la chaîne d’information CNN explique que les Etats-Unis ont pu compter sur le soutien de la France dans les dossiers libyen, iranien, afghan et syrien, « mais avec Hollande, il n’y a aucune garantie que les Etats-Unis pourront compter sur ce soutien ». Barack Obama et François Hollande auront l’occasion de discuter de ces sujets, et bien d’autres, au cours d’une rencontre bilatérale que le président américain a appelée de ses vœux lors d’un entretien téléphonique avec le socialiste au cours duquel il l’a aussi félicité pour sa victoire. Les deux hommes se retrouveront les 20 et 21 mai à Chicago pour le sommet de l’OTAN. Peut-être évoqueront-ils le temps que François Hollande a passé aux Etats-Unis dans sa jeunesse : en 1974, il a sillonné le pays dans le cadre de son cursus à HEC, pour réaliser une étude sur le marché du fast-food. Il en aurait gardé un amour du hamburger. Cela lui fait au moins un point commun avec Barack Obama.
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$100 et il se met toute la press US a dos en moins de 3 mois.
Eh bé pas terribles les “analyses” de la presse US, que de banalités ! ça ne donne pas envie d’aller lire ces canards. Et personne n’a fait le rapprochement Bush/Sarko avec la guerre en Libye, les amis nantis, les ambitions de conquête méditerranéenne, les goûts de luxe aux frais du contribuable, ni les points communs de frugalité entre Hollande et Obama (sandwiches aux réceptions à la Maison Blanche, réduction des traitements des ministres… peut-être licenciements à l’Elysée, ça serait pas mal ?!) et expliquer une fois pour toutes à l’Américain lambda le sens actuel de “socialiste” à la Française.
La presse US qui pourrait jouer un rôle de décryptage, d’explication de ce qui se passe DANS les pays européens afin d’éduquer un peu ses lecteurs reste toujours aussi superficielle (sauf quand il s’agit d’analyses économiques aussi poussées que stériles — quand pex les taux de chômage ne représentent pas la même chose dans des pays différents).
Dommage, on aurait bien besoin d’aller plus loin afin que l’Américain moyen comprenne ce qu’il peut avoir en commun avec le Francémoyen sur le plan humain (et ce qui les sépare). Cette élection aurait pu être un prétexte. Encore une occasion de ratée. Enfin, il y en a qui sont allés à Tulle.
Je rejoins tout à fait Pierrot ! Quel niveau !
Quant à Rosecrans Baldwin, imaginer que Sarkozy va manquer aux français !!
C’est vraiment n’avoir rien compris ni senti des 5 années passées…
Je réitère : que les français de New-York votent pour Sarkozy c’est vraiment là aussi le reflet d’un non vécu au quotidien en France…