Ses formes géométriques et son trait épuré sont plus connus que son nom, mais, en toute discrétion, François Avril s’est taillé une place à part dans le monde de l’art. La galerie Philippe Labaune lui consacre une exposition, du jeudi 20 avril au samedi 27 mai.
C’est la première fois que François Avril est exposé à New York, mais la ville lui est familière. « D’abord parce que c’est une ville et que j’adore les villes, confie-t-il. Peut-être parce que je suis né à Paris, mais il y a quelque chose de rassurant pour moi, bien posé, droit… ». Et New York, en particulier, a souvent été source d’inspiration, notamment depuis sa première visite en 1990. « J’y suis venu après le décès d’un ami et ça a été un vrai choc visuel; la ville m’avait redonné l’envie de vivre après ce moment difficile ».
Comme en hommage à cette source d’inspiration, une dizaine des œuvres exposées à la galerie Philippe Labaune sont consacrées à New York. Ou plutôt quelque chose qui y ressemble. « Les paysages, urbains ou autres, que je dessine ne sont jamais une reproduction exacte, je les réinvente plutôt ». Il ne dessine sur place que très rarement, préférant de loin le confort de son atelier bruxellois ou de sa maison bretonne. Et toujours de mémoire: « je prends parfois des photos, mais je ne les regarde jamais. Je fais tout de mémoire, mon cerveau retient ce qui compte ».
Après les villes (New York, Paris, Bruxelles, Tokyo), il a, depuis une quinzaine d’années, découvert la nature. « Il a fallu qu’on me propose une exposition en Bretagne pour que j’aborde la nature, mais une nature figée, statique. Depuis je suis devenu Breton d’adoption et je dessine autant les côtés de Bretagne que les villes ! ».
Ce n’est pas le seul contraste de la carrière et de l’œuvre de François Avril. Car s’il exerce son talent sur des toiles grand format, c’est avec un style qu’on associe plutôt au très petit format, celui de la vignette de BD. Il n’a que peu dessiné pour la BD pourtant, mais il a commencé dans l’illustration et surtout continue de revendiquer l’héritage de la ligne claire, le style rendu célèbre par Hergé. « Le dessin, le trait noir, ça reste le plus important pour moi, dit-il. Au fond, je fais de la peinture de dessinateur… ». François Avril appartient à cette génération qui a fait entrer la BD et l’illustration dans les galeries d’art. « Au début on a subi quelques moqueries, sur le mode “ces illustrateurs qui se prennent pour des artistes”, mais moi j’étais très à l’aise, plus que dans la BD en fait. La BD c’est extrêmement pointilleux, rigoureux, on est penché sur sa table, c’est long, le temps est un peu dilué. Finalement, je suis plus à l’aise sur de grandes toiles, qui nécessitent une énergie concentrée qui me va mieux ».
S’il a beaucoup dessiné et aimé New York, la ville le lui a pour l’heure peu rendu. Il a un peu dessiné pour le New Yorker, mais le graal des dessinateurs a depuis longtemps cessé de le faire rêver. « C’est un rêve d’illustrateur, mais je ne le suis plus, je suis passé à autre chose». En s’exposant dans la galerie de Philippe Labaune, qui se consacre à promouvoir aux États-Unis un univers qui reste largement à l’écart de l’art « officiel », François Avril fait un peu le trajet inverse d’un de ceux qu’il cite parmi ses sources d’inspiration, Edward Hopper. Avant de devenir le porte-drapeau de la peinture réaliste américaine, il avait fait ses débuts à Paris. « Il me plaît bien, pas seulement à cause du style réaliste mais surtout parce qu’il venait du dessin lui aussi, il a fait de la publicité et il n’était dans aucune école, il a fait son chemin et il a fini par être reconnu pour sa vision personnelle ». Un hommage qui a des airs de profession de foi…
Exposition « François Avril. Vertical Silence », du 20 avril au 27 mai. Philippe Labaune Gallery, 534 West 24th Street, New York, NY 10011.