Mickaëlle X. Bizet est une Française qui monte à Hollywood. Expatriée à Los Angeles, l’actrice a été remarquée dans la série “American Crimes”, dans laquelle elle joue le rôle d’une jeune fille au pair, Gabrielle Durand. Quand le scandale Weinstein a frappé, elle n’est pas complètement tombée des nues. “Je n’étais pas surprise. Choquée, dégoûtée, oui. Mais pas surprise”, déclare la jeune femme.
Mickaëlle X. Bizet fait partie de ces actrices françaises émergentes, bien décidées à réaliser leur rêve hollywoodien. Depuis deux semaines, elles et le reste des Etats-Unis vivent au rythme des révélations quasi-quotidiennes contre le producteur Harvey Weinstein, accusé de harcèlement sexuel et de viol.
Plusieurs Françaises ont pris la parole pour dénoncer son comportement (Emma de Caunes, Judith Godrèche, Léa Seydoux, Marion Cotillard…). D’autres, comédiennes moins connues, n’ont pas croisé le chemin d’Harvey Weinstein. Malgré tout, ces révélations ont réveillé en elles des souvenirs de situations similaires.
“Toutes les actrices ont vécu une histoire comme celle-là. Quand on dépend des envies des réalisateurs ou producteurs, on a forcément un côté vulnérable”, raconte Roxane Mesquida, révélée au grand public dans la série “Gossip Girl”. La Française aux yeux clairs a commencé sa carrière à 13 ans. “J’ai eu la chance d’avoir été mise en garde par ma mère qui m’a élevée seule. Cela a sûrement joué dans ma carrière”, admet celle qui fut l’une des muses de la réalisatrice Catherine Breillat, qui lui a ouvert les portes du cinéma américain.
Le tête-à-tête de Laura Weissbecker avec “Shower guy”
Actrice émergente, Laura Weissbecker a accusé Harvey Weinstein dès 2016 dans son livre Comment je suis devenue une chinoise. Racontant son ascension en Chine à la suite du film “Chinese Zodiac” de Jackie Chan, l’Alsacienne de 33 ans confie un épisode difficile de sa carrière : sa rencontre avec un “producteur mondialement connu, un Américain au ventre énorme et à la liste de films presque aussi impressionnante que son abdomen.”
Sans le nommer, elle décrit Harvey Weinstein, dont on reconnaît le “modus operandi”. Il l’avait convoquée à son hôtel lors du Festival de Cannes. Le producteur américain avait alors débarqué “vêtu d’un simple maillot de bain mouillé”. “Il hoche la tête d’un air connaisseur, tel un œnologue réputé qui examinerait un vin rouge, jugeant la couleur avant de vouloir le goûter”, écrit-elle dans son livre, méfiante de cet homme dont elle connaît “la réputation sulfureuse”.
“Il me cite franco toutes les actrices avec qui il a couché et dont il a fait des stars.” Il décide de prendre une douche, et lui propose de poursuivre la conversation.“Tu n’es même pas obligée d’entrer dans la salle de bain, tu peux rester dans le couloir”, lui dit Harvey Weinstein. Mais Laura Weissbecker préfère s’éclipser, sans ruiner ses chances : “Je lui confie que j’aimerais beaucoup prendre une douche avec lui, mais un autre jour, car je suis très pressée.” Elle sera harcelée de coups de téléphone de la part de son assistante avant qu’il “se lasse et m’oublie”.
Cet épisode lui a inspiré le hashtag #showerguy. “Malheureusement, il y a un certain nombre de #showerguys dans l’industrie cinématographique, je me suis retrouvée dans des situations très difficiles quand je débutais comme comédienne alors que je ne m’y attendais pas du tout; #harvey est sans doute le plus connu mais malheureusement pas le pire”, a-t-elle écrit sur Facebook (elle n’a pas répondu à nos demandes de commentaire).
Roxane Mesquida n’a pas été confrontée au harcèlement sexuel aux Etats-Unis.“Je fais des films indépendants, confidentiels. Ce n’est pas du tout ce que fait Harvey Weinstein.” À 18 ans, elle s’est toutefois retrouvée dans une situation délicate. “Mon agent m’avait organisé un rendez-vous chez un réalisateur. Il voulait faire des photos de moi, nue, pour participer au financement du film. J’ai refusé et il m’a insulté. Je suis partie en courant”, se remémore la Marseillaise de 31 ans. “Mon agent n’était pas choqué.” Depuis, elle a toujours évité de rencontrer les professionnels dans leurs chambres. “Après (la vingtaine passée) ça se calme, on se fait une réputation”.
Ancienne enseignante au collège et lycée, Mickaëlle X Bizet ajoute qu’elle n’est plus aussi “fragile” qu’au début de sa carrière. Cela ne l’empêche pas de prendre des précautions. “Maintenant, ajoute Mickaëlle X. Bizet, je me dis que je ramènerai quelqu’un avec moi en cas de rendez-vous dans un hôtel.”