Mauvaise nouvelle pour les producteurs de foie gras. La Cour Suprême des Etats-Unis a rejeté, lundi 7 janvier, l’appel de professionnels de la filière contre l’interdiction de cette spécialité culinaire dans le Golden State. La loi sanctionnant les commerçants de lourdes amendes reste donc en place.
C’est la fin d’une procédure à multiples rebondissements, qui a tenu tous les amoureux de foie gras et ses détracteurs en haleine pendant plusieurs années aux Etats-Unis et dans le reste du monde. Tout a commencé en 2004, quand l’Etat a adopté une loi interdisant la fabrication et la consommation de foie gras. La loi n’est entrée en vigueur qu’en 2012, n’empêchant pas plusieurs chefs de le proposer quand même et les particuliers d’en commander auprès de fournisseurs en dehors de Californie. Une longue procédure judiciaire a alors été initiée par des producteurs et restaurants pour lever cette interdiction. La loi avait été suspendue en 2015, puis remise en vigueur en 2017 mais n’était pas encore appliquée depuis.
Les associations de défense animale mettent en avant le traitement inhumain et douloureux dont font l’objet les oies, gavées pour permettre l’élargissement de leur foie, pendant le processus de production.
Un discours que contredit volontiers le restaurateur français Vincent Samarco, qui rappelle que “quand l’oie migre, elle se gave naturellement”. Plus que cela, il regrette une entrave à un pan de l’histoire gastronomique. “Le foie gras est réalisé depuis l’Egypte antique, on retrouve les recettes en hiéroglyphes dans les pyramides”, tient à rappeler le propriétaire du restaurant français Belle Vie à Brentwood, qui est “tombé des nues” en découvrant cette décision. “Je trouve ça dommage qu’on interdise des produits du terroir vieux de 3.000 ans dans un pays où l’on consomme à outrance du sirop de maïs ou de la junk food, qui provoquent des problèmes de santé importants. C’est hypocrite.”
Son établissement, ouvert depuis août 2016, proposait ce met “fait sur place” sous différentes formes à sa carte : en terrine, en tournedos rossini, ou encore dans un pot-au-feu qui devait être ajouté à la carte jeudi. “C’est un vrai produit du terroir, plus que la soupe à l’oignon ou le steak-frites. On pourrait très bien faire un recours folichon en défendant l’art de la table à la française, inscrit au patrimoine de l’Humanité, argue-t-il, mais je ne suis qu’un petit restaurateur”.
Malgré la demande, le propriétaire de Belle Vie va devoir s’en passer : “on ne peut pas se permettre de payer une amende de 1.000 dollars pour un produit que l’on vend 28 dollars.” Certains ont alors pensé à des alternatives : vendre un verre de vin à 50 dollars, et offrir gratuitement une assiette de foie gras. La (petite) résistance s’organise.
Chez Church & State à Arts District, le foie gras a disparu du menu depuis presque 7 ans. “Même si je ne suis pas végétarienne, je pense que ce n’est pas quelque chose de crucial ou d’essentiel qui mérite tant de controverse”, défend la propriétaire Yasmin Sarmadi. Avec son mari aux fourneaux, le chef Tony Esnault, ils sélectionnent avec vigilance des viandes sans antibiotiques, élevées de manière naturelle. “Dans l’Egypte ancienne, le gavage était naturel, ce n’est plus le cas.” Tony Esnault plaide pour plus de régulations, “que les canards puissent courir et se nourrir naturellement, sans recours aux antibiotiques”.