Du haut de ses vingt-six ans, Felix Nestor a façonné son rêve américain en quelques coups de ciseaux. En 2020, le jeune Français rachète un barber shop à Alameda, une île située en face de San Francisco. « Une période très difficile pour se lancer » admet-il avant d’ajouter : « j’y ai mis toutes mes économies, j’ai décidé de tout rénover et… de miser sur moi. Un risque de fou ! »
Alors que la pandémie de Covid-19 bat son plein, il imagine ainsi le XIII, un salon de coiffure pour hommes, « un endroit pour décrocher de sa routine, se détendre, se faire beau, rencontrer d’autres gens ». Le nom fait référence à Louis XIII, un roi qui accède au trône très jeune. Et les lieux reflètent « l’élégance et le luxe », avec un chandelier central en guise de clin d’œil.
En un an, Felix Nestor se crée un nom et plusieurs personnalités poussent les portes du XIII. Des artistes comme le rappeur T.I. ou le chanteur August Alsina, et de nombreux sportifs. Parmi eux, le boxeur Tony Yoka, plusieurs joueurs de basketball de la NBA (Michael Porter jr, DeMarcus Cousins…), de football (Arturo Vidal, Clément Langlet…) comme de football américain (Jonathan Abram, David Sharpe…), tous venus jusqu’à lui pour une coupe.
La recette de ce succès ? Avoir su utiliser les réseaux sociaux Instagram et TikTok comme vitrine. « Le marketing, c’est mon fort alors j’ai montré mon travail dans des vidéos qui m’ont apporté de la crédibilité » explique l’entrepreneur. En peu de temps, ses vidéos cumulent en effet des millions de vues et attirent quelque 120 000 followers. Ce qu’il aime mettre en avant ? « La qualité de ses dégradés ». Ce qui caractérise en outre son approche ? « Coiffer ceux qui perdent leurs cheveux pour que ça se voit moins et pour leur donner confiance ».
Depuis quelques mois, ses clients – célèbres ou non – peuvent aussi expérimenter sa propre ligne de produits : une pommade brillante, un masque à l’argile, une huile pour la barbe, une poudre coiffante et une mousse pour les cheveux. « Un projet qui a pris plusieurs années pour déterminer les bonnes formules, trouver les fournisseurs de qualité et décider du design » explique le patron-coiffeur.
Pourtant, Felix Nestor se destinait à un tout autre avenir. « Mes deux parents sont coiffeurs, j’ai grandi autour des ciseaux et tondeuses. Après l’école, j’allais au salon et je m’étais promis que je ne ferai jamais comme eux ! ». Pas très scolaire et plutôt agité, il confie « ne pas avoir été le meilleur élève de la classe ». Rapidement, il manifeste son désir de quitter sa région natale de Saint-Etienne pour partir étudier l’anglais aux États-Unis. « Depuis petit, mon frère et moi venions rendre visite l’été à une tante installée près de San Francisco. J’ai toujours vu les USA comme un paradis, avec la vision de l’American dream » raconte t-il.
En 2016, il débarque comme étudiant. Doué de ses mains, il choisit ensuite de s’orienter dans le bâtiment et pose ses valises à Oakland. Puis un jour où il se faisait coiffer dans un barber shop d’Alameda, il a demandé au patron s’il le prendrait à l’essai. « Aux États-Unis, si tu es volontaire pour faire un job, on te prend. Contrairement à la France, tu peux te créer tes opportunités » affirme Felix Nestor.
C’est comme ça que tout a commencé. Autodidacte, il se forme alors lui-même et enchaîne par une école de coiffure à Oakland en 2018-2019. « Ça a été assez rapide de me remettre à niveau. Je suis très visuel et je devais avoir ça dans le sang » s’amuse t-il à dire. Depuis, le barber-patron continue son ascension et ne compte pas s’arrêter là : « je suis très content, mais je veux toujours faire mieux, continuer d’investir et prendre des risques ! ».