« Lorsque je regarde dans le miroir j’ai honte, quand je me compare, c’est pire ». Cette très mauvaise paraphrase peut néanmoins s’appliquer à la perfection quand on compare l’Europe et les États-Unis. Nous avons désormais en ce bas monde, une 2 CV et une Ferrari et aucun mécanicien à l’horizon pour espérer changer le moteur et la carrosserie… Cela fait plus de 15 ans que sur les dix critères qui permettent de mesurer le droit d’espérer un avenir meilleur, il n’en est pas un seul qui place l’Europe sur l’échiquier mondial à 2050. Dans le top 5, on prévoyait que l’Allemagne parviendrait à conserver sa place, mais désormais le pays de la bière sent le sapin, son leadership industriel fuit de toute part, notamment en Chine qui devient plus innovante et plus spécialisée qu’elle, en version discount. Pourquoi tant de haine ?
Les raisons sont nombreuses, mais tiennent quand même beaucoup à la crasse politique qui marque au fer rouge nos divers pays en Europe. Il n’est plus contestable, ni même politiquement incorrect de dire que le gouvernement Macron aura mené le pays au sommet de l’incompétence. Les chiffres sans cesse aggravés de la dette, à l’insu du plein gré d’un ministre des Finances pour qui l’économie resta un mystère, suscitent l’incrédulité de tout élève de CAP. L’Allemagne ne parvient plus à se renouveler et Angela Merkel a été un remarquable outil du maintien du statuquo, certes, mais dans un monde où l’immobilisme n’est plus en marche. L’Italie riche d’un super Mario à qui il aura fallu 800 pages et 15 ans pour réaliser que l’Europe avait raté le coche du virage technologique et qu’il fallait appuyer sur l’accélérateur d’urgence. Ce que de modestes entrepreneurs comme nous, disions depuis déjà plus de dix ans et en une page et demie. Bref, notre classe politique est crasse, celle des États-Unis n’est pas toujours plus brillante, mais l’économie dépend moins d’eux. C’est toute la différence.
Parmi les critères qui expliquent le succès possible d’une nation, il y a de nombreux éléments. L’investissement. La fiscalité. La stabilité juridique. L’indépendance et l’accès aux ressources essentielles. La dette. Les brevets. La recherche etc…
L’un des plus importants à ce jour, reste l’investissement. La dette est également un critère clé, mais tout dépend de sa composition. Elle est infiniment plus lourde aux États-Unis, mais elle est non seulement composée d’une masse plus critique d’investissements et non un tonneau percé de coûts de fonctionnement insensé comme en France notamment, mais elle est aussi compensée par une fuite en avant positive, alimentée par la croissance. Enfin quand on parle d’avenir, l’indépendance et l’accès aux ressources est essentiel, et sur ce terrain, nous cédons aux BRICS la plus grande partie des ressources mondiales dont le monde aura besoin demain pour prospérer et seuls les États-Unis peuvent encore y résister et combattre.
L’investissement tout d’abord. Sur la partie non technologique, il reste à l’Europe de beaux restes. Elle investit encore. Les grandes entreprises sont de belles machines incrémentales, fondées sur de bonnes vieilles habitudes. On ne change rien, on investit là où l’on a pied et on évite de s’aventurer au-delà. Sur ce point, nous faisons jeu égal avec le reste du monde.
Sur les investissements technologiques, nous sommes six fois moins investisseurs que les incrémentales et plus de trois fois moins que la Chine. Par tête d’habitant. La « brillante » Ursula, réélue sur d’autres critères que la compétence, déclarait ainsi à Davos, en février dernier que nous devions nous emparer du sujet de l’IA. Je parle bien de 2024 !!! La Chine a commencé il y a plus de douze ans. Macron a annoncé un plan de 500 millions en 2022, autant dire de l’argent de poche, quand la 20e ville Chinoise investit dans le même temps près de 2 milliards. 500 millions, de quoi rire jaune. Nous sommes totalement dépassés sur cette technologie, mais aussi sur le quantique, l’espace, les puces… En clair, dans la boule de cristal de l’avenir lié à la technologie, aucune sœur Anne ne voit rien venir en Europe !
Et quand il s’agit des ressources nécessaires aux data-centers, aux batteries des véhicules électriques, aux métaux rares de nos téléphones, nous sommes et serons totalement dépendants du reste du monde. Jean-Dominique Senard, président de Renault, le rappelait encore récemment, en moquant un continent qui veut de l’électrique mais n’a pas de supply-chain pour se fournir les matériaux nécessaires pour l’alimenter.
La calamiteuse politique africaine de ce gouvernement nous a aliéné le Burkina, le Niger, le Gabon. Autant dire le bois, l’uranium, le lithium, l’or et tant d’autres ressources livrées aux Russes. Notre incapacité à vouloir exploiter ce qui constitue une des plus grandes réserves au monde de métaux rares (notamment) qui se trouvent au pied d’un littoral le plus important au monde (grâce aux DOM TOM), nous prive de ressources qui nous tendent pourtant les bras.
Les États-Unis l’ont compris. Depuis deux ans, ils accélèrent en Afrique pour ne pas la laisser aux mains des Russes et des Chinois. Ces derniers, associés dans les BRICS à l’Arabie Saoudite, la Turquie, le Venezuela, la Russie, sont à la tête de ressources qui feront de l’Europe leurs vassaux dans les quinze années à venir. À nouveau, seuls les États-Unis ont une politique comparable. La Chine et le Moyen-Orient achètent depuis dix ans des terres agricoles, l’or vert véritable du futur, et Bill Gates à lui seul est devenu l’un des plus gros propriétaires de terres agricoles au monde.
L’Inflation Reduction Act de Biden, un lourd débit à mettre à son crédit, a attiré tous les plus gros investissements de la terre et permis une réindustrialisation basée sur un prix compétitif de l’énergie, pendant que l’Europe étouffe ses PME (63 000 liquidées en France en douze mois), non seulement en les ayant condamnées par une politique Covid dont nous réalisons enfin qu’elle était insensée et mortifère, et en leur assénant le coup final par des coûts stratosphériques de l’énergie. Elle est pourtant disponible en telle quantité que nous l’exportons. Une folie, doublée par la duplicité de l’Allemagne de Merkel qui a tout fait pour tuer le nucléaire en France, et continue à voter pour des appels d’offres Européens qui sont gagnés par les États-Unis et la Corée contre EDF, et fait rouler ses voitures électriques au charbon. Quand on a des amis comme ceux-là, nul besoin d’ennemis.
L’arrivée de Trump au pouvoir va ouvrir une ère de négociation intense. Menaces de droits de douane accrus, investissements massifs dans la Tech et l’IA sous la houlette et les conseils de Musk, dans l’espace et j’en passe. Comme les Chinois, le président américain menacera de taxer ce que nous savons exporter, nos avions et nos alcools notamment, en échange d’ouverture à ses produits agricoles et autres. Il va accroître le leadership des États-Unis de l’IA, en négociant (comme Biden) un Yalta avec la Chine sur ce point précis, excluant totalement l’Europe pour qui il n’a que peu de considération, surtout pour Macron, lui préférant, pour les négociations sur l’Ukraine, le premier ministre hongrois Viktor Orban. Naïve, désordonnée et sans vision, l’Europe va être rasée mais pas gratis.
L’élection américaine a prouvé que les sujets clés pour les oubliés, qui se rappellent au pouvoir dans toutes les sociétés occidentales, étaient nationaux. Pouvoir d’achat. Identité. Immigration. Retour à soi. L’Ukraine n’intéresse que moins de 2% des électeurs qui se demandent pourquoi l’on dépenserait autant d’argent pour ce pays lointain, alors qu’aux États-Unis les ponts doivent être consolidés, les routes refaites et qu’on pourrait l’utiliser pour pardonner encore plus de dettes, baisser les coûts de scolarité et surtout celui de la viande, des fruits et des légumes. Les mêmes causes produiront les mêmes effets en Europe. Sur l’Ukraine, Trump va donner le coup fatal qui poussera à la négociation. Sur Israël, contrairement à Macron, loin de lâcher les Israéliens, les stigmatiser et les livrer à leurs bourreaux en Hollande ou ailleurs, non seulement il va les soutenir, mais appuyer très fort sur l’Iran.
Je finirai en vous posant une question. Qui voyez-vous dans les dix premières puissances mondiales en 2050 ? Si vous y voyez un Européen, écrivez-moi, j’aimerais tellement me « TrUmper ».
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À propos de l’auteur : Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement et PDG-fondateur de Top Cream.