“Si j’ai réalisé un film sur le Crazy Horse, c’est surtout parce que j’adore les femmes“. Le réalisateur Frederick Wiseman est connu pour montrer le corps humain dans tous ses états. L’octogénaire, une des géants du documentaire américain, avait montré le corps brisé dans «Welfare», critique du système de santé américain, le corps vendu dans «Model», satire du monde de la mode. Dans son dernier documentaire « Crazy Horse : Désir », il s’attache à montrer le corps de la femme magnifié. “Et puis, j’adore la danse” confie-t-il dans un français parfait.
Crazy Horse est le dernier volet d’une trilogie consacrée aux institutions artistiques française – il a également filmé la Comédie Française et le ballet de l’Opéra de Paris. Loin des clichés, des corps jetés en pâture à l’imagination masculine, le Crazy Horse ré-invente la séduction et l’érotisme de manière artistique. A aucun moment, les protagonistes du film n’emploient le mot « strip-tease », préférant qualifier leur travail de “meilleure revue de nu chic au monde“. Une revue que Frederick Wiseman filme à pattes de velours, toujours en retrait avec sa caméra, évitant les pièges des documentaires classiques, comme les interviews en face-à-face, puisque “à partir du moment où l’on interviewe quelqu’un, on lui indique déjà comment on voudrait qu’il pense“.
Avec beaucoup de retenue et une pincée d’audace, le réalisateur épie mais ne brise jamais l’intimité de ce monde où les femmes semblent avoir pris le contrôle. En s’effaçant volontairement, Frederick Wiseman se plonge dans ce cabaret quasi-hermétique au reste du monde. Paris n’apparaît d’ailleurs presque pas au cours des 2h14 du film. Le montage oscille entre scènes de vie courante (essayages, réunions, répétitions) et numéros de danse. Le réalisateur s’attache à montrer l’art universel de la sensualité qui s’exerce au Crazy Horse, même si il admet que “l’effeuillage chic et burlesque est une spécificité française“.
En habitué des sujets polémiques, Frederick Wiseman traite également dans « Crazy Horse », de manière implicite, du féminisme. Peut on vraiment faire un spectacle de nu sans tomber dans l’instrumentalisation du corps ? Pour le réalisateur, la réponse est oui: “Ce qui est étonnant au Crazy Horse, c’est qu’il n’y a aucun tableau mélangeant hommes et femmes. La femme reste maîtresse d’elle-même, même lorsqu’elle se déshabille, un peu comme si elle avait le pouvoir sur l’audience. ” Et la caméra de Frederick Wiseman ne fait que la sublimer.
Infos pratiques :
« Crazy Horse : Désir », 2h14, réalisé par Frederick Wiseman, en salle au Film Forum, 209 West Houston St.
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Endroit très fermé ( il faut montrer patte blanche pour y entrer), le Crazy Horse offre l’apparence d’un lieu où la femme contrôle en effet non seulement son corps mais aussi la beauté dans toute l’acception du terme: beauté des gestes mais aussi des tenues, certes ‘minimales” mais SUPERBES .
N’oublions pas que ces femmes sont très jeunes et qu’elles ont un entraînement qui n’a rien à envier à des sportifs de haut niveau.