« Il y aura un avant et un après 24 septembre 2024 ». Voila les premiers mots employés par Catherine Lepetit pour décrire ce que l’ouragan Helene a provoqué dans sa vie. Cette mère française de trois enfants et entrepreneure, installée à St Petersbourg, n’imaginait pas vivre un tel cauchemar. Parce que cette tempête surpuissante ne devait pas toucher si durement cette partie de la côte est de la Floride. « Même si nous vivons au bord de l’eau, nous avions décidé de ne pas évacuer car personne ne nous l’avait suggéré. Vers 6pm, on a vu l’eau qui débordait de la petite digue qui sépare la mer de la maison alors que c’était marrée basse ! On s’est dit qu’a marée haute, on serait complètement ensevelis alors nous sommes partis en urgence ».
Après avoir passé la nuit en sécurité chez des amis à 5 minutes de chez eux dans les terres, les Lepetit retournent le lendemain pour constater l’étendue des dégâts. « La maison avait bien sûr pris l’eau, c’est de l’eau salée mais aussi de l’eau des égoûts. Il y en avait jusqu’au niveau de la hanche. Mais le pire c’est que les murs de cloison sèche ont tout absorbé et sont devenus mous ! Nous avons dû les couper par le bas. ». Pour toutes les réparations, la famille sera remboursée par son assurance.
En revanche, l’entrepreneure ne le sera pas pour sa marchandise, stockée pour moitié dans sa maison avant l’ouragan. L’autre partie était dans sa voiture qui a été balayée par la tempête. « L’assurance ne prendra pas en charge car je n’ai pas pris d’assurance inondation pour mon entreprise ». Catherine Lepetit n’a pas de boutique. Elle vend sur les marchés de la région ses articles de plage (serviettes, t-shirts, crèmes, chapeaux…). Une marque qu’elle a montée il y a un an. Elle estime ses pertes à 50 000$. Il y a le coût de la marchandise perdue mais elle a aussi dû s’arrêter de travailler pendant 5 semaines. « Je viens juste de reprendre. J’ai besoin de liquidités pour relancer la production ». Alors le collectif d’une soixantaine d’entrepreneurs auquel elle appartient a décidé de lui ouvrir une cagnotte go fund me.
Quant à sa maison, épargnée par l’ouragan Milton 15 jours plus tard, elle espère y retourner très vite. Catherine Lepetit, son mari et son plus jeune enfant sont toujours logés par des amis. Elle souhaite retrouver ses deux adolescents qui, faute de voiture, sont hébergés séparément près de leur école. La mère de famille reste optimiste. La résilience et le courage s’entendent dans sa voix. « Ça serait tellement bien si on pouvait être tous réunis pour Thanksgiving ».
La maison d’Olivier Rodriguez, du côté de Tampa, elle, a tenu bon. Seulement quelques dégâts mineurs étaient à déplorer après le passage d’Helene. Mais malheureusement, cet ancien chef pâtissier du Biltmore Hotel à Coral Gables ne peut pas en dire autant du coffee shop/chocolaterie de St Pete Beach qu’il tient avec son associé Grégory Pugin depuis 2021. « L’eau s’est infiltrée par le toit. 60 centimètres d’eau stagnante. Elle a apporté avec elle du sable qui est resté. Toutes les machines, notamment celles qui servent à la production de chocolat, sont a l’arrêt, inexploitables pour le moment ». Le natif d’Annecy a lui aussi été pris de cours. Personne dans cette localité ne s’attendait à voir de tels dégâts. « On en a eu des ouragans ces dernières années. À chaque fois, on s’en était très bien sortis. Cette fois c’est différent ».
Le plus dur pour lui, c’est de ne pas savoir quand il va rouvrir son commerce. Car contrairement aux autres professionnels du quartier qui, selon lui, semblent résignés, Olivier Rodriguez compte bien retrouver sa clientèle au plus vite. Ses clients les plus fidèles ont tout de suite répondu présent pour alimenter la cagnotte gofundme qu’il a ouverte pour faire face à la fermeture temporaire de son business. Il estime avoir perdu 150 000$ de matériels et 50 000$ de produits alimentaires. « Pour tout ce qui est réparation du local, c’est au propriétaire de s’en charger. Reste à savoir quand ce sera fait. Je ne veux pas rouvrir dans ces conditions car ce serait mettre en danger le public avec la moisissure ». Six semaines ont passé et l’entrepreneur ne sait toujours pas si ses machines sont exploitables.
D’autres sinistrés laisse leur colère s’exprimer. C’est le cas de Mickael Roche, un entrepreneur originaire de Nice. Avec sa femme Nathalie, ils en veulent à la mairie de St Pete Beach. « On nous met des bâtons dans les roues. Tout est une question de business et d’argent. J’ai commencé à faire les réparations et puis au bout de 4 semaines les agents municipaux sont venus nous demander d’arrêter les travaux pour défaut de permis ! On a même dû démolir ce qu’on avait fait », affirme t-il, dépité. Sans compter que son local n’est pas assuré pour les inondations car il se trouve sur une île. « Et puis, il y aussi la difficulté à trouver des entrepreneurs car tout le monde a des travaux à faire après ces deux ouragans. C’est catastrophique, nos pertes s’élèvent à environ 280 000$ entre le chiffre d’affaires et les rénovations. » L’entrepreneur et sa femme ont eux aussi pu compter sur la générosité de leurs clients qui leur ont ouvert un gofundme. Si les procédures d’obtention de permis s’accélèrent, le restaurant de Mickael et Nathalie Roche, qui emploie 18 salariés, pourrait rouvrir dans le courant du mois de novembre.
Helene est le deuxième ouragan plus meurtrier avec plus de 230 morts dans plusieurs États du Sud-Est.
Quant à Milton qui a frappé deux semaines plus tard, le coût de la reconstruction est estimé à plus de 87 milliards de dollars par les autorités.