C’est une autre journée marathon san-franciscaine qui s’est déroulée le mardi 20 juin pour Laurent Bili, le nouvel ambassadeur de France à Washington, en poste depuis le 6 mars dernier. Le matin, il a inauguré, en présence de London Breed, maire de San Francisco, et de nombreux consuls européens, les nouveaux locaux du Consulat général de France. En effet, depuis octobre 2022, les citoyens français ont désormais accès aux services consulaires au 44 Montgomery street.
Du 32e étage, la vue sur la Transamerica et la Coit Tower, avec la baie de San Francisco en arrière-plan est époustouflante : « On m’avait dit que c’était splendide… J’en connais beaucoup qui vont être jaloux ! », note Laurent Bili avec humour. London Breed est également sous le charme de sa propre ville : « J’ai une vue bien moins agréable de mon bureau », proteste-t-elle en plaisantant.
Face à une assistance enchantée d’entendre la maire de San Francisco utiliser quelques mots de français, London Breed rappelle les liens forts qui unissent Paris à la ville californienne : « Nos villes sont jumelées depuis 26 ans, nous avons signé un partenariat entre l’orchestre philharmonique de Paris et le SF Symphony, et demain, nous célébrerons la Fête de la Musique avec des concerts dans 46 lieux différents en ville », souligne-t-elle. Faisant référence aux récents articles qui dressent le portrait d’un San Francisco ravagé par la drogue et l’insécurité, elle corrige cette image avec véhémence : « Ce qu’on peut lire dans les journaux n’est pas le reflet de la réalité. Certes, le centre-ville fait face à quelques difficultés, mais on constate aussi que des grandes marques françaises comme Chanel et Yves Saint-Laurent agrandissent leurs magasins. »
Pour Laurent Bili, la découverte de la Californie est une première, teintée d’un soupçon de nostalgie : « La première fois que je suis venu aux États-Unis, je n’avais pas tout à fait vingt ans. J’avais prévu de visiter la Nouvelle Orléans, le Grand Canyon et la Californie, en faisant du stop. Malheureusement, le prix du dollar est passé de cinq à dix francs, et la voiture qui m’a pris m’a amené en Utah. De là, j’ai poursuivi jusqu’en Alaska. Jusqu’à maintenant, la Californie était un grand regret de ma vie. »
Depuis sa prise de fonctions, le nouvel ambassadeur de France s’est déjà rendu à Austin durant South by Southwest, New York et Miami. Face à l’immensité du pays, il explique avoir à cœur de « voir le plus vite possible hors les murs » de Washington. Deuxième communauté française aux États-Unis après New York, San Francisco compte près de 27 000 inscrits sur les listes consulaires.
Frédéric Jung, Consul général de San Francisco, a eu à coeur de faire découvrir les multiples facettes du dynamisme de la région. En visite pour une semaine, Laurent Bili fait un premier bilan très positif de sa visite : « J’ai pu commencer ma visite en allant au devant de la culture française dans ce qu’elle a de plus noble, avec la découverte de la Napa Valley, puis l’émouvante remise des palmes académiques à Najine Shariat, qui a fondé la Santa Rosa French-American Charter School, un exemple de réussite de l’accès au français pour tous. À Stanford, nous avons surtout parlé politique avec la visite du Research Institute for the Study of International Affairs, puis de la Hoover Institution, où j’ai pu échanger avec Condoleezza Rice. À l’époque de la guerre en Irak, on s’adressait à peine la parole… Nous avons surtout évoqué la Chine et l’Ukraine, dans un contexte où les relations entre la France et les États-Unis sont très bonnes. »
Côté tech, Laurent Bili retient surtout le potentiel de l’intelligence artificielle. « Parmi les 20 meilleures entreprises dans le domaine, 16 sont situées dans la région, dont 11 à San Francisco, précise-t-il. On ne connaît pas encore tous les domaines d’application de l’IA, mais sa réglementation est au cœur de nos discussions. »
L’ambassadeur s’est laissé conduire par une voiture autonome chez Waymo, une expérience qu’il avait déjà eue auparavant, mais pas en pleine ville. Il a en outre visité Salesforce, LoftOrbital, Google et Nvidia, et a noté le dynamisme généré par la collaboration des entreprises avec les universités et les instituts de recherche.
À San Diego ce jeudi, Laurent Bili va visiter EDF Renewables, l’environnement étant toujours un des piliers de la feuille de route donnée par Emmanuel Macron, et inaugurera la nouvelle antenne de la French Tech : « On a parfois une image un peu datée de la France, celle d’un pays qui réglemente, tandis que les États-Unis inventent. La multiplication des licornes en France, ainsi que l’accompagnement dont bénéficient les nouvelles entreprises, en ont fait une start-up nation ».
Dernier volet de cette visite, la politique, avec une rencontre avec la lieutenant gouverneure Eleni Koulanakis à San Francisco, et la perspective de s’entretenir avec le gouverneur de Californie, Gavin Newsom lors d’un déplacement à Sacramento. « La France adopte une position neutre concernant les affaires intérieures des États-Unis, mais il est toujours intéressant d’observer les dynamiques sur place, et les processus de levées de fonds, comme celle qu’effectue Joe Biden à San Francisco en ce moment. Cette visite en Californie permet de prendre le pouls d’un État, à l’approche des élections présidentielles de 2024. »