On dit souvent que les données sont le pétrole du XXIème siècle. Pour Emmanuel Letouzé, New York en est la plaque-tournante.
« New York vit un momentum autour du big data. De multiples start-ups se créent autour de ce domaine, la ville prend des initiatives, et des instituts se spécialisent sur ce sujet », affirme ce chercheur français, qui vit à Brooklyn et a fondé Data-Pop, dont le lancement officiel est prévu le 17 novembre.
Cette start-up entend devenir un think-tank sur les usages des big data, et aider la société civile et les gouvernements (en particulier de pays en voie de développement) à mieux s’emparer des ressources qu’elles peuvent offrir.
Attablé à la caféteria de ThoughtWorks, l’incubateur qui héberge Data-Pop sur Madison Avenue, Emmanuel Letouzé esquisse au crayon quelques schémas pour débroussailler le sujet.
« On ne comprend pas toujours ce que sont les big data. Pour simplifier, ce sont d’abord toutes ces données digitales que l’on laisse autour de soi, via son téléphone, les réseaux sociaux, des moyens de paiement, les objets connectés, et dont le nombre et la variété se sont démultipliés ces dernières années. Ce sont aussi de nouvelles capacités d’analyse de ces données – ce qu’on appelle le machine learning. Et tout un écosystème d’acteurs autour », explique Emmanuel Letouzé, qui termine une thèse sur ce sujet à Berkeley, et qui est l’auteur d’un rapport de l’ONU sur le développement et les big data, paru en 2012.
« Mon approche, c’est d’aller au-delà de l’aspect technologique de ces données. De montrer par exemple quelles politiques prédictives on peut mettre en place en fonction de modèles observés, par exemple pour réduire la criminalité, ou pour réagir lors d’une crise sanitaire. Ce qui me passionne, ce sont les implications politiques et éthiques des big data», poursuit-il.
Autour de Data-Pop, il y a du beau monde. Cette start-up est co-créée par Harvard (via le Harvard Humanitarian Initiative), le MIT Media Lab, et ODI, un think-tank anglais spécialisé sur les questions humanitaires. Il a reçu des fonds de la fondation Rockefeller, de la Banque Mondiale. Et a déjà des commandes pour des études de la part plusieurs institutions, dont les Nations Unies et l’AFD.
« Nous devrions avoir un budget d’un million de dollars d’ici à la fin 2015 », estime Emmanuel Letouzé, qui a réussi à attirer dans ses filets, en tant que directeur académique, Alex Sandy Pentland, un professeur du MIT considéré comme un ponte des big data.
Les datas, c’est aussi une source d’inspiration pour l’autre passion d’Emmanuel Letouzé : la bande dessinée. Car en dehors de son activité très sérieuse de consultant et chercheur, ce Breton de 39 ans, papa de jumelles de 4 ans, pratique l’art du cartoon. Et ne désespère pas de voir un jour ses dessins publiés dans le New Yorker.
En attendant, on a pu voir son coup de crayon sur divers sites (Rue 89, StuffExpatAidWorkersLike, et aussi dans French Morning), sous le pseudo de Manu. Il a aussi fait une exposition au MIT Media Lab, avec une quinzaine de dessins abordant, de façon humoristique, l’univers des données. Si les datas sont du pétrole, elles lui donnent aussi de bonnes idées.