C’est une espèce collante et invasive, qui s’agrippe aux huîtres, aux pontons, aux coques des bateaux. Vous ne connaissez sans doute pas la crépidule (“Atlantic limpet” en anglais), mais vous pourriez la voir bientôt à la carte de restaurants américains. Ce fruit de mer à chair blanche, dont le gout ressemble à celui de la moule, fait depuis le mois dernier son retour aux Etats-Unis.
Un pays dont il est originaire : selon la légende, la crépidule a gagné les côtes françaises au moment de la seconde guerre mondiale, accrochée aux coques des bateaux. Depuis, elle a proliféré dans les eaux bretonnes et normandes – l’espèce croit de 10% par an.
C’est la société Britexa, basée en Bretagne, qui orchestre son retour sur le continent américain. Depuis 2010, Pierrick Clément a entrepris de mettre au goût du jour ce coquillage, peu consommé en France et malaimé, car nuisant à l’ostréiculture. Il a même lancé un nouveau nom, plus poétique : le berlingot de mer. Il les pêche avec un bateau adapté, et a monté, près de Cancale, une usine permettant de les préparer et de les commercialiser à grande échelle . Il traite actuellement 5 000 tonnes de ces coquillages par an (il affirme en être l’unique producteur). Il exporte dans le sud de l’Europe, en Asie, et a aussi réussi à séduire quelques chefs français.
Aux Etats-Unis, il fait face à une page blanche. “C’est un marché prioritaire pour nous”, souffle-t-il. Même si la crépidule existe, elle n’est pas consommée. « L’Atlantic limpet est présent en moindre quantité et vit dans des eaux qui ne sont pas propices à la pêche », justifie Pierrick Clément, qui compte, avec son distributeur américain South Bay Seafood, approvisionner les grands restaurants.
Un lancement était organisé début juin à New York à l’International Culinary Center. Restaurateurs, critiques gastronomiques, chefs : une quarantaine de personnes sont venus tester ce mollusque. Intrigués, notamment, par le long article que le New York Times a consacré à cette espèce.
Philippe Fallait, du café Triskell, dans le Queens, en a fait une tempura à la farine de blé noir. Un chef américain, Emmet McDonough, l’a infusé dans une chaudrée, avec pommes de terre, crevettes et bacon. « Ce coquillage donne une saveur unique. C’est un fruit de mer surprenant, entre le champignon, la moule, la palourde. Il faut trouver une manière spécifique de le préparer, car il ne remplace aucun autre. Je pense que cela peut marcher, car les clients, ici, sont toujours à l’affut de nouveautés. Il peut très bien s’adapter à la cuisine américaine, garnir des pizzas, des pates ». Hiroyuki Tanaka, un chef japonais de Philadelphie, a fait revenir les crépidules en poêlée et les a déposés sur un maki de légumes. Il les a également fait déguster façon sashimi, crus, avec une pointe de citron.
Dans la salle, les participants semblaient conquis. « C’est vraiment fabuleux », a déclaré Armel Joly, cofondateur du bar à vins Ocabanon. Un avis partagé par Michel Plombet, chef du Parigot : « Je vais en acheter. C’est léger, pas agressif. Les gens ici adorent les fruits de mer, donc il y a un gros potentiel. » Pour l’Atlantic limpet, l’heure d’un deuxième débarquement a-t-elle sonné ?
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Incapables de trouver une issue en France, ils vont l’importer à ceux qui consomment de la M…
Médiocre satisfaction. Pas de marketing dans leurs équipes ??