La French Tech est en pleine effervescence. Après Backmarket, qui a annoncé lever 335 millions de dollars la semaine passée, c’est cette fois au tour de Contentsquare de pulvériser un nouveau record : la startup qui est spécialisée dans l’analyse de l’expérience utilisateur pour l’e-commerce, a bouclé un tour de table de série E de 500 millions de dollars auprès du japonais Softbank, qui la valorise à 2,8 milliards de dollars. Soit la plus grosse enveloppe jamais levée par une pépite tech française.
Pour son fondateur Jonathan Cherki pourtant, lancer une entreprise dans la tech ne venait pas de soi. « Au départ, je devais rejoindre l’entreprise familiale d’import-export de fruits et légumes secs créé par mon grand-père, et pour laquelle travaillent mon père et mon frère ». Mais c’est sur les bancs de l’Essec qu’il décide de suivre une autre voie. Passionné par les statistiques, il monte un projet d’entreprise tech pendant ses études, et grâce au programme d’incubation de l’Essec, parvient à lever 400.000 dollars auprès de business angels. L’aventure Contentsquare commence.
Les premières années, Contentsquare affine son offre et s’attache à réduire le délai d’implémentation de ses solutions par ses clients. En 2016, il commence le développement international avec l’Angleterre, plus proche et facile à attaquer. « Nous avons senti que le marché devenait plus mature et qu’il fallait accélérer. Pour cela, nous avons levé 20 millions de dollars fin 2016 et je suis arrivé aux États-Unis en 2017 ». Le marché américain répond très vite et fort, et Jonathan Cherki décide d’aligner ses moyens financiers à une stratégie ultra-ambitieuse. Le groupe boucle trois levées de fonds en trois ans : 42 millions de dollars début 2018, 60 millions de dollars début 2019 et enfin 190 millions de dollars il y a à peine un an, en mai 2020. Il est aussi passé à la croissance externe: quatre acquisitions signées dans les 18 derniers mois. La dernière en date est celle de la société israélienne Clicktale, qui était son principal concurrent aux États-Unis, en mars 2020.
Depuis, la pandémie a certes obligé la jeune pousse à réduire ses coûts et faire des sacrifices, mais elle a eu un impact positif considérable : l’accélération de la digitalisation du monde. « Ma maman qui n’avait jamais acheté en ligne a commencé à le faire pendant la crise Covid. Et elle va continuer à le faire ». Les chiffres sont éloquents : l’e-commerce représentait 11 % des ventes en 2010, 16 % en 2019 et 35 % l’an passé. Et Contentsquare a bien l’intention de s’octroyer une place de leader mondial dans le marché mondial de l’analyse de l’expérience client, estimé à 21 milliards de dollars à horizon 2025.
Aujourd’hui, le premier marché de Contentsquare est américain, où il génère 50 % de ses revenus contre 45 % en Europe. Avec deux bureaux à New York et San Francisco et 200 personnes basées sur tout le territoire, il compte muscler ses effectifs, essentiellement sur les fonctions de vente, marketing et service client, alors que la partie tech est centralisée en France et à Tel-Aviv. Au total, le groupe va recruter 1.500 personnes avec cet argent frais, et enrichir son pôle innovation, en particulier sur l’intelligence ce artificielle. Enfin, il va pousser les feux en Asie, où il a quelques bureaux mais qui ne représente encore que 5 % de son chiffre d’affaires. « Softbank va nous aider à développer le marché asiatique, et nous avons des ambitions et objectif communs ». Enfin, Contentsquare a annoncé créer une fondation pour promouvoir l’accessibilité digitale dans le monde, et un incubateur pour faire grandir des startup tech. « C’est ma façon de ‘give back’, il ne faut pas oublier d’où on vient ».