Lors de l’avant-dernière saison du Bureau des Légendes, Malotru, l’agent secret interprété par Mathieu Kassovitz, avait été surnommé « Pain in the Ass » par les services de renseignement américains. Il faut croire que les petites aventures des agents secrets français n’ont finalement pas été si douloureuses que cela de ce côté-ci de l’Atlantique : les Américains ont en effet décidé d’adapter la série ! Le remake s’appellera The Department et prendra sans doute place au cœur de la CIA.
L’adaptation sera pilotée par Showtime (groupe Paramount), avec 101 Studios (Yellowstone, Tulsa King, etc.), ou encore Smokehouse Pictures, la société de production de… George Clooney, qui est également annoncé à la réalisation de plusieurs épisodes. Les Français à l’origine de la série seront aussi de l’aventure : Alex Berger et sa société The Originals Productions (TOP) veilleront à ce que l’esprit du Bureau soit conservé dans l’adaptation (Eric Rochant, le créateur de la version originale, devrait quant à lui se tenir à l’écart).
« C’est une immense fierté pour nous, sourit Alex Berger depuis son bureau parisien. Ce remake nous met dans un club extrêmement fermé de producteurs ayant signé avec une grande maison pour une adaptation, poursuit ce Franco-américain né à Philadelphie il y a 61 ans. Rares sont les remakes américains de concepts français qui aient été réussis, que ce soit en série ou au cinéma. Notre rôle sera de préserver la marque Le Bureau des Légendes. »
Car Le Bureau… est devenu un phénomène dans le monde entier depuis sa création en 2015. La série a été vendue dans une centaine de pays et a connu un succès fou. « Nous sommes de loin la série française la plus exportée au monde, assume Alex Berger. La série a notamment rencontré un énorme succès aux États-Unis où elle a été diffusée sur Apple, puis Sundance et enfin Amazon. »
Un engouement qui a poussé la Paramount à acquérir les droits d’adaptation à AMC qui avait été le premier sur le coup. Après quelques retards à l’allumage, voilà le remake désormais bien lancé. « Les Américains sont très curieux des succès, ils se disent qu’ils peuvent mieux faire, justifie Alex Berger. Ce succès a stimulé nos partenaires. Pour eux, adapter une série déjà existante leur permet d’avoir des rails sur lesquels travailler. On a fait le gros du travail, et un nouveau showrunner va devoir en faire autre chose. »
La tâche du showrunner, cet auteur qui pilote l’écriture d’une série – qui a été choisi mais dont le nom est encore confidentiel – ne sera pas simple. Il devra adapter une série très française dans son style et dans son rythme à une écriture américaine très différente. « Il y a une différence entre Homeland et Jack Ryan, où on est davantage dans le fantasme, et nous, où tout est très réaliste, reconnaît Alex Berger. C’est le style d’Eric Rochant, qui a mis en scène des gens de tous les jours qui font un métier extraordinaire. Ce n’est pas forcément très hollywoodien. Mais c’est certainement parce qu’on n’est pas pareil que cela suscite de l’intérêt. On va essayer de réunir le meilleur des deux mondes : des États-Unis, le processus d’élaboration, et de chez nous la créativité à la française. L’idée, c’est de toute façon de ne pas faire la même chose. De trouver les arches narratives les plus intéressantes : une histoire d’amour, ses complications, des amis qui peuvent aussi être des ennemis… »
La présence de Georges Clooney dans le projet va braquer un peu plus les projecteurs sur The Department. « Il a été contacté par David Glasser (ndlr : CEO de 101 Studios), raconte Alex Berger. Il a dit qu’il connaissait la série, que sa femme l’adorait et qu’il avait vu une ou deux saisons. Il a demandé quelques mois pour pouvoir voir le reste des saisons et se décider. Une semaine plus tard, il avait tout avalé, il avait trouvé ça génial et il était partant pour le projet. La réalisation l’intéresse mais peut-être un peu plus. Il est qualifié, il connaît l’Europe, la géopolitique, il a tourné dans Syriana, c’est un sujet qui l’intéresse. »
Pourrait-on le voir également acteur dans la série ? « C’est lui qui décide, répond Alex Berger. S’il a envie, on ne dira pas non ! » Une quinzaine de noms a été couchée sur le papier pour interpréter les rôles principaux. Il faudra attendre encore un peu pour avoir « le droit d’en connaitre », une des expressions qui avait fait mouche lors du lancement de la série.
La version française, elle, aura droit à une suite, un peu différente, « sur un continent voisin », précise Alex Berger, que l’on devine être l’Afrique. « Le monde et la place de la France en Afrique ont beaucoup changé ces dernières années », poursuit-il. Sa société, The Originals Productions, développe par ailleurs une série sur le BCRA et le début des services secrets en France en 1942. Où là aussi, il sera certainement question d’agent double, de trahison, et de bureaucratie à la française.