Nolita il y a 20 ans, c’était un quartier sulfureux, nous dit Laurent Dupal. “Ah, c’était chaud, très italien… Un type s’est fait tirer dessus devant un kiosque à journaux juste à côté de la pâtisserie, sur Spring Street.”
C’est dans cette rue, aujourd’hui pleine de boutiques branchées, que Laurent Dupal a ouvert sa pâtisserie française en juillet 1992, à une époque celles-ci ne courraient pas les rues de New York. Il avait alors 25 ans.
Depuis, Ceci-Cela n’a pas bougé de Spring Street. Mais le propriétaire a décidé de tirer le rideau à la fin de son bail – d’ici un an. “Je paie un loyer en dessous du marché, et je ne peux pas aller au-delà. Il fallait partir”, affirme le pâtissier originaire de Nancy, qui, avant d’arriver aux Etats-Unis, officiait dans les cuisines du Club Med en Guadeloupe et en Tunisie.
Que les fans se rassurent : une nouvelle pâtisserie Ceci-Cela va prendre le relais. Laurent Dupal vient de l’ouvrir dans le Lower East Side, sur Delancey, à un block de son appartement. “J’aime beaucoup ce quartier, ça me fait d’ailleurs un peu penser à Nolita il y a 20 ans”, raconte Laurent Dupal, avec ses airs de bon vivant farceur.
La nouvelle version de Ceci-Cela reste dans le même esprit que sa première enseigne. Les croissants – qu’on a testés et qui sont très bons – sont fabriqués directement dans la pâtisserie. La femme de Laurent Dupal, une Texane, prend votre commande derrière le comptoir. On peut aussi déguster des brioches, des pains au chocolat, siroter un cappuccino ou grignoter des salades et sandwichs sur des tables, à côté de touristes japonais.
Car si Laurent Dupal est bien connu dans la communauté française de New York, il est aussi une petite célébrité en Asie. “J’ai énormément de touristes asiatiques qui viennent à la pâtisserie. Des Chinois, des Coréens, des Japonais… Il y a plein de guides asiatiques qui parlent de Ceci-Cela, et surtout, il y a un groupe de pop coréen qui s’appelle Ceci-Cela.”
Le nom de sa pâtisserie, c’est toute une histoire. C’est son associé, Hervé Grall, qui l’a proposé, après en avoir demandé l’autorisation au chanteur Renaud, son ami d’enfance. “Sur le répondeur de Renaud, sa fille Lolita avait enregistré un message où elle disait ‘vous pouvez laisser un message ceci-cela’. C’est resté… Et c’était aussi le nom de la maison de disques du frère de Renaud.”
Renaud a aussi laissé sa trace dans la déco de Ceci-Cela, au travers d’un incongru arrêt de bus parisien vintage (“Rennes – Littré”), planté dans la pâtisserie de Spring Street. Laurent Dupal promet qu’il le déménagera bientôt dans le nouveau local de Delancey. “C’était Renaud et Hervé qui l’avaient piqué il y a très longtemps, Hervé l’a gardé comme objet de déco dans son appartement avant de l’amener ici.”
Outre sa pâtisserie, ce père de trois enfants gagne son beurre en fournissant en croissants et pains au chocolat 450 clients – principalement des hôtels, coffee-shops, boutiques et restaurants de la ville, comme Dean & DeLuca ou l’hôtel Marriott Marquis. Il possède une grande cuisine à Brooklyn, et emploie au total 40 personnes. “Je pourrais ouvrir d’autres pâtisseries, mais c’est pas mon truc. C’est comme les femmes, je suis très bien avec une”, rigole Laurent Dupal.
Quant à son associé Hervé Grall, il a pris la clé des champs. Il s’occupe de la grande ferme qu’il possède avec Laurent Dupal dans les Catskills, où il invite régulièrement ses amis. “On élève des volailles, des pintades, on fournit des copains qui ont des restaurants à New York, explique Laurent Dupal. On a aussi des chevaux, des plantations, et une truffière qu’on a mise en route il y a quatre ans.” Un coin de tranquillité, bien loin des touristes japonais et des grandes avenues du Lower East Side.
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Toutes mes felicitations Laurent! Un exemple de reussite mais aussi et surtout un exemple d’authenticite a suivre. Plus de 10 ans que je vis a NY et je m’y rends regulierement pour vos croissants et vos patisseries entre autres quand ce n’est pas la galette des rois :)) Bravo et bonne continuation dans le LES!!