“On est un peu des OVNI au CES“, concède Baptiste Pageot. Responsable commercial de MyFood, le jeune Français présente au public du Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas (jusqu’au 10 janvier) une belle serre, posée dans l’entrée du pavillon de la French Tech, au coeur de l’Eurêka Park, l’espace du salon consacré aux start-ups venant du monde entier.
Depuis mardi, les curieux se pressent à l’intérieur de cette serre où poussent des salades et autres herbes, conçue pour permettre à chacun de produire des légumes. La serre rassemble différentes technologies et techniques (aquaponie, permaculture, outils connectés pour générer des données sur la serre, panneaux solaires…) destinées à faciliter la production tout au long de l’année en milieu urbain.
L’alsacienne MyFood fait partie des nombreuses jeunes pousses à promouvoir la tech environnementale française au CES, grande vitrine des technologies de demain. Cette année, une vingtaine d’entreprises, actives dans les domaines de la mobilité, bâtiment intelligent, lutte contre le gaspillage alimentaire, l’emballage écolo ou encore l’agriculture urbaine et l’AgTech (tech agricole), ont fait le déplacement, dans cette ville qui n’est pas connue pour son écologisme. Leur ambition: décrocher des investisseurs, la presse ou simplement des contacts pour tester leur concept. “Les Français ont un socle de valeurs communes autour de ce qu’on mange et le goût des bonnes choses simples. Ces dernières passent par les végétaux. C’est pour cela que nous poussons notre serre et qu’on assume le fait de vouloir manger de bons produits frais“, déclare Baptiste Pageot, dont les parents avaient un potager. Avec 200 serres dans le monde entier, dont le Qatar, MyFood vise à présent le marché américain. “Vu la taille du marché américain et le prix de la nourriture organique, on s’est dit qu’il y avait un intérêt pour nous à être ici“.
À quelques pas de là, Quentin Rousselot et Elsa Maccario pratiquent eux aussi de l’agriculture urbaine. Mais au lieu d’une serre, ils proposent des potagers clé en main dans le cadre de leur petite entreprise Agrove, passée par The Camp, l’accélérateur futuriste d’Aix-en-Provence. Eux aussi sont venus au CES dans l’espoir, à terme, de se développer aux Etats-Unis. Dans l’immédiat, ils sont venus chercher de la presse et des entreprises susceptibles de valider leur produit. “Les gens ont besoin de sens. L’agriculture urbaine est une problématique d’avenir et on se positionne dessus. Comme c’est compliqué au niveau politique, la solution viendra des entreprises“, veut croire Quentin Rousselot, fils d’agriculteur.
Verdir et embellir les villes, c’est aussi la problématique à laquelle veut répondre Olivier Ayasse, un passionné d’architecture et de jardinage qui a passé vingt ans à travailler dans l’Internet des Objets. De ces différents centres d’intérêt, il a créé une app nommée Connected Garden où un jardinier virtuel, Archibald, aide les particuliers à optimiser l’utilisation de leur jardin. Après l’installation d’un capteur dans la pelouse, “Archie” indique par exemple quelles fleurs sont les plus adaptées à l’espace vert. À l’aide de la réalité augmentée, l’app signale aussi les plantes qui ont besoin d’être soignées et la manière de le faire. Le chef d’entreprise a rencontré plusieurs investisseurs potentiels “solides” lors de ce salon 2020, deuxième CES pour lui. “Leur appétit pour les Clean Tech ou Green Tech se base sur les attentes de millennials. Si on ne verdit pas nos villes, l’avenir va être compliqué“, affirme Olivier Ayasse.
La mobilité était elle aussi bien représentée. Les trottinettes électriques de Green Riders étaient de la partie, tout comme le service de co-voiturage RideSVP, les vélos électriques Coleen et le vélo-cargo solaire à trois roues de Saint-Denis de la Réunion Wello, l’une des stars tricolores d’Eurêka Park. “Nous avons eu beaucoup de presse“, se félicite Mélodie Ribeiro. La start-up a pu tester son véhicule léger, utilisé par La Poste et EDF entre autres, sur 30 kilomètres dans le Red Rock Canyon à l’extérieur de Vegas, dans le désert de Mojave, et le long du “Strip”, cette longue artère touristique où se situent les grands hôtels-casinos de la ville. Le produit n’est pas encore vendu à l’étranger, mais cela pourrait changer. Lors du CES, Wello a eu des touches de la part d’acheteurs en Floride et en Californie. “On réfléchit à l’exportation“, précise Mélodie Ribeiro. Le monde en a besoin.