Le French Bulldog ou bouledogue français, connaît aux États-Unis une popularité incroyable depuis quelques années, au point de figurer second (derrière le Labrador retriever) au classement établi par le très respecté American Kennel Club, l’association canine qui comptabilise chaque année le nombre de chiots pure race sortis des élevages américains. Chouchou des stars, de Lady Gaga à Leonardo di Caprio ou Snoop Dogg, le French Bulldog défraie pourtant la chronique depuis quelques mois, victime de vols à répétition.
Tout commence en février 2021 dans le quartier d’Hollywood. Comme tous les soirs, Ryan Fisher, le dog-sitter de la chanteuse Lady Gaga, emmène en promenade les trois bouledogues français de la star américaine. Attaqué par surprise par deux hommes qui n’hésitent pas à lui tirer plusieurs balles dans la poitrine, Ryan Fisher s’écroule, laissant deux des trois chiens, Koji et Gustav, se faire embarquer par les ravisseurs. Trois jours après avoir promis une récompense de 500.000 dollars à celui qui mettrait la main sur ses chiens, la star retrouvait finalement ses progénitures. Le dog-sitter, lui, survivra sans que les médias s’intéressent à son sort…
Depuis, de plus en plus de maîtres de bouledogues français sont victimes d’attaques violentes et de dognappings. Fin décembre, Robert Martinelli, designer à West Hollywood, se fait traîner sur 200 mètres en tentant d’échapper au vol de son chien. Début janvier, dans le même quartier de West Hollywood, c’est Rachel Avery qui se fait subtiliser son bouledogue Jag. Des cas similaires sont observés à Oakland et à San Francisco. Un phénomène qui inquiète les autorités comme les maîtres. « La question du prix joue beaucoup dans cette histoire, explique Jessica, une Franco-américaine propriétaire de Zac, un bouledogue français à Highland Park. À plus de 5000 dollars la bête, c’est pire que de se balader avec un sac Louis Vuitton et plus rentable qu’un vol d’iphone. »
Éleveuse depuis 20 ans via sa société Frenchbulldogsla située à Ojai (à environ 1h45 de Los Angeles), Docteur Marika Zoll constate avec regret l’amplification du phénomène : « les French Bulldogs sont d’abord victimes de leur gentillesse. Ces chiens-là ne feraient pas de mal à une mouche. Leur tempérament social, leur douceur, leur bonne entente avec les autres chiens, les enfants et les humains en général font d’eux des proies faciles. Ils suivraient n’importe quelle personne qui se montre gentille avec eux. Croyez-moi, ces chiens-là sont de l’amour en paquet, une vraie thérapie du bonheur que j’applique à certains des patients que je reçois en consultation thérapeutique. Pas étonnant que les voleurs s’en prennent à eux plutôt qu’à un berger allemand. »
Autre raison de leur popularité : leur rareté. Outre une portée moyenne de 5 chiots chez un bouledogue français, le nombre d’élevages sérieux dans la région se compte sur les doigts de la main. Débordée par les demandes d’adoption depuis les débuts de la crise sanitaire – « une période où tout le monde a voulu, du jour au lendemain, avoir son propre chien » -, la spécialiste du French Bulldog a ainsi vu sa liste d’attente exploser. Aujourd’hui, 300 personnes attendent l’heureux événement. « Pour se procurer un bébé bouledogue, les gens sont prêts à tout. À Los Angeles, certains futurs propriétaires laissent même de grosses avances pour se procurer un chiot, oubliant même parfois de les récupérer… mais cela ne marche pas comme ça. Le French Bulldog se mérite. Ce n’est qu’après plusieurs appels en Face Time, de multiples échanges et la garantie qu’ils bénéficieront d’une assurance, que j’accepte de les confier. » Un luxe rare donc, et à l’origine de nombreuses convoitises.
Descendant du bulldog anglais, dont il partage certaines particularités – ainsi du museau aplati, de la mâchoire puissante ou du poil court -, le French Bulldog doit son nom à son apparition en France à la fin du XIXème siècle. Né d’un croisement entre un bouledogue anglais et un terrier, il est d’abord utilisé comme chien de garde et devient la race préférée des commerçants, des bouchers et marchands de vin de Paris, avant de s’inviter dans les foyers aisés. En France, son prix plus « accessible » – entre 1000 et 1500 euros -, l’épargne généralement des attaques dont il est victime aux États-Unis.