Pour son ouverture sur Madison Avenue, Mauboussin voit grand. Au sens propre : 500 mètres carrés répartis sur 5 étages. Et l’ambition de cette concept store est à la même mesure : en faire un lieu de respiration et un lieu de gourmandise. « Je voulais que la boutique soit un endroit où le client puisse être inspiré par tous ses sens, avec une atmosphère ludique et évocatrice» résume Alain Nemarq, le directeur général de Mauboussin.
Une nouvelle boutique de luxe à Manhattan? L’ouverture semble tomber au mauvais moment. « C’est symbolique d’ouvrir quelques semaines avant le 4 novembre, c’est symbolique d’ouvrir en pleine crise financière » s’enthousiasme Alain Nemarq « La nouvelle société américaine qui en ressortira elle sera forcément plus forte, plus nouvelle, et s’implanter à ce moment-là, moi je trouve que c’est s’implanter au moment de l’espoir. »
L’architecte à l’origine de ce « magasin de l’ère du temps », David Rockwell, a cherché à créer un nouvel espace, un lieu qui casse certains codes de présentation de la joaillerie. Oubliées les vitrines et les comptoirs. Elles induisent un comportement passif. Place aux boîtes à trésor : sorte de boîte à cigare sur pied d’environ un mètre de haut, avec un couvercle-miroir, vers laquelle il faut se pencher.
Pour mieux marquer la coupure avec l’extérieur, on entre dans le magasin comme dans un appartement, par une entrée sombre séparée. Le rez-de-chaussée, consacré aux pierres de couleur, et le premier étage, dédié aux diamants et aux montres, sont comme des écrins grandeurs nature : parquet sombre, murs foncés, éclairage tamisé. Cette sorte d’élégante caverne d’Ali Baba ménage de nombreux espace de vente, avec tables et profondes banquettes en cuirs comme dans un bar.
Changement de décor au deuxième étage, où les clients trouveront les bijoux du mariage. Parquet clair, murs blancs et longues plumes blanches en guise de décorations. Les deux derniers étages sont le royaume du goût. Au troisième, le Salon des Gourmandises proposera kougloffs au chocolat et à la cannelle, avec des écrins à bijoux sur les tables de dégustation. Le quatrième est une salle à manger privée, toute en bois et briques, aux meubles modernes, réplique du loft new-yorkais typique. Un dîner mensuel y sera organisé. Yannick Alléno, le chef du restaurant du Meurice se déplacera spécialement pour l’occasion.
Des artistes seront aussi exposés. Actuellement, on peut voir les sculptures de Marine Delterm dans le Salon des Gourmandises. « C’est un lieu de partage » décrit Alain Némarq. « Je voulais que les new-yorkaises quand elles viennent chez nous elles se disent qu’elles ont le temps de respirer on va leur permettre de goûter la création, de goûter des gourmandises. »
Le joaillier voulait une boutique à l’image de la ville où il s’implantait et non une réplique des boutiques parisiennes. L’option de Fifth Avenue a été volontairement écartée. « On ne voulait pas aller à New York, on voulait aller sur Madison» assure Alain Némarq. « Madison Avenue est une des grandes avenues de la mode. Elle est probablement entre la Place Vendôme et les Champs-Elysées. »
Fondée en 1827, « le Joailler de l’émotion » ouvre un point de vente à New York dans les années 1930, mais le ferme en 1965 car la clientèle se trouvait à Paris ou s’y rendait régulièrement. Dans les années 2000, la maison opère une mutation , se modernise, et devient le joaillier de la couleur, « le joaillier de l’ère du temps ».
Mauboussin lance alors une collection par an et met l’accent sur la création, que ce soit autour des diamants, des pierres précieuses ou semi-précieuses. L’idée : toucher un public large, avec des bijoux allant de 750 dollars à 15 millions de dollars. A travers ces nouvelles créations, le joaillier s’adresse à une nouvelle génération de femmes contemporaines, actives, susceptibles de s’offrir elle-même un bijoux.
Ouvrir une boutique à New York semblait évident pour Alain Némarq : « Mauboussin a toujours été un peu fasciné par le caractère des Etats-Unis qui représentait le pays où tout était possible, le pays de la liberté.» C’est aussi la première étape de la conquête du marché américain.
L’enseigne programme d’ouvrir soixante points de vente dans les trois ans à venir. Elle a acheté vingt-deux pleines pages de publicité dans le New York Times pour introduire la marque auprès des consommateurs américains. Un pari osé pour un marché en saturation ? « Les marques représentent seulement 6% du marché mondial des bijoux » répond Alain Nemarq. « Les marques vont devenir majoritaires sur ce marché comme pour les autres produits. Il y a donc un potentiel énorme. »
Mauboussin
Madison Avenue at 63rd St