Chaque jour, le soleil se lève et “Mignonnes” se prend une salve de critiques. À peine deux semaines après sa sortie sur Netflix le 9 septembre, le film français n’en finit pas d’ulcérer la droite américaine. Si bien que sa réalisatrice, Maïmouna Doucouré, a signé une tribune dans le Washington Post pour en prendre la défense, mardi 15 septembre.
“Cuties”, son titre anglais, raconte l’histoire d’Amy, une fillette de 11 ans élevée dans un milieu musulman conservateur en France. Elle se libère progressivement en rejoignant un groupe de jeunes danseuses insouciantes qui fréquentent son école. Conçu comme une critique de la sexualisation des jeunes filles sous la pression des réseaux sociaux, le film a été vertement critiqué pour ses images jugées inappropriées des protagonistes. En cause: des scènes de “twerking”, filmées à grands renforts de gros plans sur les corps des actrices.
La polémique s’est répandue rapidement chez les conservateurs. Plusieurs sénateurs républicains, dont l’élu du Texas Ted Cruz, ont demandé l’ouverture d’une enquête auprès du ministère de la justice pour déterminer si Netflix avait enfreint les règles relatives à la production et la diffusion de programmes pédo-pornographiques. Les procureurs généraux de quatre États (Ohio, Texas, Floride et Louisiane) ont demandé, le 14 septembre, que le film soit retiré de la plateforme. Et un élu républicain de Floride, Vern Buchanan, a condamné “Mignonnes” le même jour où il a présenté une proposition de loi sur l’interdiction de poupées sexuelles en forme d’enfants.
En dehors des cercles politiques aussi, les critiques vont bon train. À l’approche de la présidentielle, “Cuties” a donné aux conservateurs une bonne excuse pour condamner la “Cancel Culture” et s’en prendre à la gauche, accusée de vouloir imposer ses moeurs libérales sur le reste de la société. Plusieurs voix de la galaxie médiatique conservatrice ont même appelé les Obama, producteurs de contenus pour Netflix, à dénoncer le film.
Netflix et plusieurs internautes (qui disent avoir vu le film) ont pris la défense de “Mignonnes” depuis sa sortie. Dans la presse américaine, le film primé à Sundance a conduit certaines plumes à s’interroger sur son message. “Cuties est un regard sans détour sur ce que cela signifie d’être une pré-adolescente aujourd’hui. C’est normal que ce soit trop pour certains“, peut-on lire dans le Washington Post. Le film a été la cible d’une “campagne d’extrême-droite” pour le New Yorker, ou est devenu un “combattant dans la guerre culturelle américaine” pour USA Today. Dans la défense de son travail dans le Washington Post, Maïmouna Doucouré espérait que “Mignonnes” susciterait un débat sur la “sexualisation des enfants dans la société actuelle et que peut-être – même – élus, artistes et éducateurs pourraient travailler ensemble à faire des changements dont les générations futures bénéficieraient“. Un rêve qui parait bien loin aujourd’hui.