Sur tous les fronts et toutes les planches, Isabelle Huppert est-elle la boulimique de scène qu’elle incarne dans la saison 3 de la série « Dix pour cent » (« Call My Agent » aux Etats-Unis) ?
« Tout le monde m’en parle ici. Il faut voir ça comme un clin d’œil, répond l’actrice par téléphone. C’est fait avec beaucoup d’humour et beaucoup de drôlerie, il ne faut pas le prendre au premier degré ».
A New York depuis le mois de janvier, son programme américain est cependant bien chargé. Venue promouvoir son dernier film « Greta », un thriller sorti vendredi 1er mars aux Etats-Unis où elle incarne une professeure de piano psychopathe qui traque des jeunes filles, Isabelle Huppert est aussi en tête d’affiche de la pièce The Mother jouée au Atlantic Theater jusqu’au samedi 13 avril.
Infatigable, la comédienne participera également à une soirée spéciale en son honneur dimanche 24 mars au French Institute Alliance Française (FIAF), en pleine rétrospective de ses films, un marathon de chefs d’oeuvres qui durera jusqu’au mardi 23 avril.
Entre les honneurs, les répétitions et les représentations, l’artiste au don d’ubiquité prend tout de même le temps d’aller au théâtre à New York, où elle réside le temps de son séjour américain. « J’aime beaucoup voir des choses que je ne verrais pas à Paris », témoigne-t-elle, avant de citer « Network » d’Ivo van Hove et « To Kill a Mockingbird » sur Broadway.
Habituée des tournages internationaux, Isabelle Huppert se retrouve sous les projecteurs américains en 2017 après avoir remporté le Golden Globe de la meilleure actrice dans un film dramatique et décroché une nomination à l’Oscar de la meilleure actrice pour son rôle dans « Elle » de Paul Verhoeven. « Evidemment, ça porte une attention particulière », observe l’intéressée pour qui la course aux Oscars 2020 « n’est pas à l’ordre du jour ». « Mais ça n’a fait que confirmer un sentiment que j’avais déjà avant : je suis perçue comme une actrice française, qui s’inscrit dans des films plutôt exigeants ».
Ce goût pour les rôles complexes est d’ailleurs ce qui l’a séduite dans « The Mother », la première pièce d’une trilogie qui met en scène les affres d’une mère de famille après le départ de ses enfants. Si l’auteur Florian Zeller est français, Isabelle Huppert a d’abord découvert la pièce en anglais, contactée par un producteur de Broadway.
« J’ai trouvé la pièce formidable », se souvient celle que l’animateur Stephen Colbert a décrit comme la « Meryl Streep française » en la recevant dans son Late Show en février 2017. « La traduction de Christopher Hampton est très bien et j’ai trouvé le rôle vraiment extraordinaire. Et comme toutes les pièces bien écrites, on peut l’emmener dans différents endroits. J’ai tout de suite compris ce que je pouvais en faire. »
C’est la troisième oeuvre de théâtre que la star joue dans la langue de Shakespeare, après Quartett dirigée par Robert Wilson en 2009 et Les Bonnes par Benedict Andrews en 2014. « J’ai vraiment fait ce que j’avais envie de faire avec le metteur en scène Trip Cullman. Je n’ai pas du tout le sentiment que je devais me plier à des normes qui n’étaient pas les miennes », témoigne-t-elle.
« J’ai trouvé une grande liberté grâce aussi à l’Atlantic Theater, un petit théâtre off-Broadway qui m’a permis de trouver un public apte à rencontrer ce genre de liberté-là », poursuit l’actrice. Un public et une critique qui ne tarissent pas d’éloges, « hypnotisés » par le talent de la tragédienne, lit-on entre autres dans le New York Times et Variety. Son accent français, qui lui avait valu des reproches dans Les Bonnes, ne semble pas gêner cette fois-ci.
Après avoir charmé les Etats-Unis, « l’aventure se terminera en avril », précise Isabelle Huppert, qui retournera début mai sur les planches à Paris dans une pièce de Robert Wilson, Mary Said What She Said jouée, cette fois, en français.