Joan et Mary ne sont pas des guides comme les autres. Volontaires au 9/11 Tribute Museum, le petit musée installé près du mémorial du 11-Septembre, la première habitait à quelques mètres de la Tour sud des Twin Towers le 11 septembre 2001. La seconde est une jeune retraitée du NYPD, la police new-yorkaise.
Ensemble, elles nous embarquent dans une visite d’un peu plus d’une heure à travers le Mémorial du 11-Septembre. Le grand mur de bronze en hommage aux pompiers sur Greenwich Street, la FDNY 10 House (caserne la plus proche du WTC), le Mémorial du 11-Septembre, les nouveaux bâtiments sortis de terre ces vingt dernières années… Elles parsèment la marche d’anecdotes personnelles sur cette journée qui a changé leur vie. Joan, qui travaillait alors dans le New Jersey, raconte par exemple que son mari, qui était chez eux au moment où les avions ont frappé les tours, a fait partie des 500 000 New-Yorkais extirpées par bateau de la pointe sud de Manhattan lors d’une gigantesque opération d’évacuation. Elle se souvient des vitres complètement brisées de son appartement quand elle l’a retrouvé quelques jours plus tard, et de l’atmosphère fantomatique qui régnait alors dans le quartier. “Vivez la vie à fond car on ne sait pas de quoi demain sera fait”, nous ordonne cette petite femme dynamique en guise de conclusion.
Ces visites très personnelles et émouvantes sont le grand point fort du 9/11 Tribute Museum. Fondé en 2006 par des proches de victimes des attentats, cette institution se distingue du grand Musée du 11-Septembre, ouvert en 2014, par son caractère intimiste. Il était initialement établi sur Liberty Street, au bord du WTC, mais s’est installé en 2017 dans un espace plus grand sur Greenwich Street, à moins de cinq minutes de marche. Ici, les guides ont tous un lien avec le 11-Septembre: ils vivaient ou travaillaient dans le quartier, ont perdu quelqu’un ce jour-là, ont participé comme volontaires aux opérations de sauvetage et de nettoyage dans “la Pile” de gravas… Ils ne sont pas des guides professionnels, et c’est justement ce qui rend ces visites passionnantes et touchantes.
Les groupes font d’ordinaire une dizaine de personnes, mais lors de notre visite, nous n’étions que… deux, soit autant que les guides. Deux visites sont organisées par jour (à 11am et 1pm). Les guides n’acceptent pas les “tips”, mais les donations sont les bienvenues car le musée est une institution à but non-lucratif.
Le ticket (35 dollars pour les adultes, 20 pour les enfants) donne aussi accès aux galeries du Tribute Museum, où les visiteurs sont replongés dans le 11 septembre 2001 et l’après. Contrairement au Musée du 11-Septembre, qui est gigantesque, ici, ont fait le pari de l’expérience à taille humaine. Vous n’y trouverez pas par exemple un grand camion de pompiers en partie écrasé, l’une des pièces les plus spectaculaires de l’autre musée, mais des objets issus du site (morceaux des tours et des avions, uniformes…), des photos et des vidéos prises à l’époque. Des volontaires participent aussi à des questions-réponses dans un espace aménagé.
Le Tribute Museum consacre aussi une grande partie de ses collections à l’élan de solidarité et d’altruisme qui a suivi les attentats, mettant en avant toutes les associations et charités fondées par des proches de victimes: des camps pour enfants ayant perdu un parent dans les attentats, un groupe de soutien aux femmes afghanes, des initiatives pour aider les “first responders”… La fondation Jérôme Lohez 9/11 Scholarship Foundation, fondée par Dening Wu Lohez, veuve d’un Français qui est décédé dans la Tour nord, visant à encourager les échanges universitaires entre la France, la Chine et les États-Unis, fait partie des nombreuses initiatives mentionnées.
Si vous vous souvenez du 11-Septembre, il sera difficile de ne pas laissez échapper une larme en découvrant ce musée trop peu connu.