Tout récemment rentré de mission spéciale à Houston, Arnauld Dumont arrive au volant de sa Citroên DS pour nous rejoindre dans un restaurant de la 3rd avenue promenade à Santa Monica. Il travaille avec des gouvernements et de grandes institutions, ses outils sont à la pointe de la technologie, et il voyage beaucoup pour des activités qui restent souvent confidentielles. Il n’est cependant pas agent secret, mais bien géomètre.
Arnauld Dumont est arrivé à Los Angeles en 2006, pour créer son entreprise spécialisée dans la photogrammétrie 3D, une technologie qui permet de recréer le modèle en 3 dimensions d’un objet mesuré à partir de photos prises en environnement hostile (sous l’eau, dans le vide, dans les souffleries, dans le nucléaire…). L’intérêt ? “L’intérêt c’est que, dans l’industrie, dès qu’il y a un problème, les gens veulent voir… », nous dit Arnauld. Il est vrai que nous sommes ravis de savoir que la Cogema sait où se trouvent leurs équipements dans les sites de déchets nucléaires de La Hague, et ce grâce à la technologie d’Arnauld.
L’ingénieur francilien né au Havre et diplômé de l’Institut français de topométrie (CNAM) a commencé sa carrière en tant que cartographe et topographe. Après avoir fait ses armes en France, ses racines italiennes et son éducation internationale au Lycée International de Saint-Germain-en-Laye le poussent au voyage, et Arnauld part pour l’Afrique, où il reste près de 5 ans. Sa première mission spéciale, Arnauld s’en rappelle: un jour, il reçoit l’appel du musée du Louvre, qui le convoque pour mesurer par photo un mur ancien, enterré là où la pyramide doit être construite.
Arnauld élabore alors un logiciel de photogrammétrie, et reproduit un modèle du mur en 3 dimensions. « C’était une technologie très pointue qui, à l’époque [dans les années 90 NDLR], n’existait pas aux Etats-Unis, donc on a eu des opportunités… » Le géomètre français se lance donc à la conquête de l’Amérique: il enchaîne de nombreuses missions de mesure et contrôle de télescopes pour la NASA, y compris pour le programme SETI de recherche d’intelligence extra-terrestre dans les années 90.
Il s’installe à Los Angeles il y a 5 ans, séduit par la position géographique privilégiée de la ville : «on n’est pas loin de l’Asie… », nous explique-t-il. Sa mission « locale » actuelle : aider l’université de Californie et ses partenaires (CalTech et A.C.U.R.A) à la construction du T.M.T, ce gigantesque télescope de trente mètre de diamètre qui explore la formation des galaxies et la création de l’univers. Quand il ne joue pas au foot dans l’équipe des parents d’élèves du Lycée Français de LA., Arnauld forme également les ingénieurs de la US. Navy, part en mission pour Shell, BP, et le géant de l’énergétique américain Excelon. Ces missions l’amènent à se retrouver dans des situations parfois extrêmes: sa dernière formation de survie consistait à s’extraire d’un hélicoptère retourné et submergé dans l’eau de mer, et ce 5 fois de suite.
Quand s’arrêtera-t-il ? Pas de si tôt : « La photogrammétrie 3D, c’est un marché croissant et en constante demande car les installations viellissent », nous dit Arnauld, « et partout dans le monde on assiste à une augmentation des contrôles et des actes de maintenance. » Jusqu’aux tragiques évènements de la semaine passée, Arnauld était en contact avec une société japonaise intéressée par ses services d’inspection de fissures (ponts, bâtiments, barrages…). “Avec les évènements, je ne sais pas trop ce que cela va donner, la priorité étant bien évidemment l’aide aux sinistrés et la prévention de toute catastrophe nucléaire”, commente-t-il. Une chose est sûre: le chef d’entreprise sait que sa technologie de contrôle pourrait aider à déterminer exactement l’état des dommages de ces centrales, et savoir si elles peuvent encore faire face à d’autres tremblements de terre et autres tsunamis…