Elle n’a que 21 ans et déjà l’assurance des stars en interview. Quand elle répond aux questions de French Morning, Karidja Touré est dans un hôtel, sous le soleil de Miami, avec son amie Assa Sylla. Les deux jeunes femmes partagent l’affiche de “Bande de filles”, le film à succès de Céline Sciamma qu’elles sont venues présenter à la Miami Beach Cinematheque, lundi. “C’est la première fois qu’on vient à Miami, glisse-t-elle au téléphone. On a hâte de ressortir pour aller à la plage” . Il ne faut jamais perdre le nord.
La jeune actrice collectionne les premières depuis la sortie de “Bandes de filles”. Repérée à la Foire du Trône par l’équipe de Céline Sciamma, elle a été nominée en février pour le César du meilleur espoir féminin. La récompense est revenue à Louane Emera pour son rôle dans « La Famille Bélier » mais la presse française s’est éprise de la gamine de Bondy, “révélation” du 7eme art français.
“Je vis au jour le jour. Il se passe de belles choses. Je suis contente de voir tout ce que je vois dans les magazines. On ne s’imaginait pas que cela irait aussi loin” , raconte Karidja Touré, qui est toujours en 2eme année de BTS.
Dans “Bande de filles”, elle joue le rôle de Marieme, 16 ans, une ado de banlieue en difficulté à l’école, où l’on veut la faire passer en filière professionnelle, et chez elle, où elle cohabite avec un frère violent, qui la maltraite. Un groupe de trois filles (Assa Sylla, Lindsay Karamoh, Mariétou Touré) va l’aider à devenir femme. Ensemble, elles chantent, dansent, parlent de mecs, boivent du whisky, se battent contre d’autres filles, rient aux éclats, pleurent, vivent. “Pendant le tournage, nous étions toutes les quatre dans un loft à Bagnolet, se souvient Karidja Touré. On s’entendait super, comme des sœurs” .
“Bandes de filles” (“Girlhood” aux Etats-Unis), un film sur la féminité au milieu des barres d’immeubles, qui se veut militant, comme Céline Sciamma l’a raconté à French Morning: rarement (voire jamais) un film français n’avait eu quatre héroïnes noires. Il poursuit sa sortie nationale en mars et avril aux Etats-Unis, un pays qui fait rêver la jeune actrice. Il y a l’attraction de Hollywood bien entendu, mais aussi de toute cette génération d’actrices afro-américaines qui se sont fait une place sur les petits et grands écrans. Karidja Touré ne cache pas, par exemple, son admiration pour Lupita Nyong’o, la mexicano-kenyane qui a tenu le premier rôle dans “12 years a slave” , “icône de la femme noire”, “fière de sa couleur de peau” . Ou encore Kerry Washington, l’actrice principale de la série “Scandal” .
“Quand j’étais petite, je ne regardais pas les films français car je ne pouvais m’identifier à aucun des personnages. Il n’y avait pas d’actrices noires. D’autres filles pensent la même chose, poursuit-elle. Mais ça change en France. « Bande de filles » est un film avec que des Noirs. Quand il est sorti, j’ai eu l’impression que tout le monde était content de ça. Mais personne n’avait agi avant pour que cela change. ”
Tentée par une carrière aux Etats-Unis, au milieu de ses idoles? Karidja Touré y songe. Elle a passé un casting pour X-Men mais n’a pas été retenue. “J’aime un peu de tout, danser par exemple. Faire un film de danse ou d’action me plairait, dit-elle. J’aimerais bien jouer à Hollywood mais pour l’instant je n’ai pas eu de proposition. “