La France doit envisager de remettre en cause la loi fiscale américaine FACTA et restreindre les informations bancaires qu’elle partage avec les Etats-Unis. C’est l’une des préconisations du rapport des députés Marc Le Fur (LR) et Laurent Saint-Martin (LREM) sur les “Américains accidentels”. Les élus ont dévoilé leurs conclusions mercredi 15 mai.
Le rapport appelle aussi Bercy à intervenir pour faire cesser les fermetures de comptes bancaires des “Américains accidentels” et demande aux Etats-Unis de faciliter la procédure de renonciation à la nationalité pour ces individus contribuables américains car ils sont nés sur le sol américain, mais qui n’y ont vécu que très peu de temps après leur naissance.
“On espère que le gouvernement va se saisir du rapport, explique Laurent Saint-Martin, député du Val-de-Marne. “Les Américains accidentels ne paraissent pas être un sujet majeur, mais leur situation en dit long sur l’acceptation de l’extraterritorialité des lois américaines par les gouvernements français et européens“.
Le rapport vise à corriger les effets pervers de la loi américaine FATCA adoptée en 2010. Cette loi de lutte contre l’évasion fiscale, appliquée en France en vertu d’un accord bilatéral conclu en 2013, permet de collecter des données relatives aux avoirs financiers d’Américains à l’étranger. Comme les ressortissants américains sont imposés sur leur revenus mondiaux, et non leur résidence comme en France, les “Américains accidentels” se sont retrouvés bien malgré eux dans le collimateur du fisc.
Pour ne rien arranger, certaines banques françaises, soucieuses d’éviter les lourdes sanctions liées à l’absence de communication des données bancaires de leurs clients aux autorités américaines, ont préféré restreindre les services ou fermer les comptes des individus présentant des liens avec les Etats-Unis (“indices d’américanité”). Un comportement qui “relève d’un excès de zèle” selon les députés et qui est dénoncé par l’Association des Américains Accidentels (AAA), qui regroupe ces “Américains malgré eux”.
En plus d’actions dirigés vers les institutions financières (rappel des règles, obligation de motiver des décisions de rupture de contrat…), les auteurs exhortent aussi le gouvernement français à ouvrir “une véritable négociation” sur cette loi, également dénoncée par certains élus républicains.
Ils appellent notamment les pouvoirs publics français à intervenir pour faire respecter la réciprocité des échanges d’informations bancaires auprès des autorités américaines. Pour l’heure, seules les institutions françaises fournissent des informations sur leurs clients américains alors que leurs homologues américaines ne font pas de même avec les données de leurs clients français. Les élus vont jusqu’à proposer de “suspendre le transfert à l’IRS de ces données collectées par les banques françaises” en attendant que les Américains respectent leurs engagements. “Il y a un côté unilatéral qui n’est pas acceptable“, souligne Laurent Saint-Martin.
Le gouvernement devrait aussi “négocier pour les « Américains accidentels » l’accès aux
procédures de régularisation amiable des manquements aux obligations fiscales“. Le règlement de l’ardoise fiscale est, en effet, la condition pour toute procédure d’abandon de nationalité. Sur ce dernier point, les élus voudraient “réduire les frais administratifs de renonciation à la citoyenneté américaine en revenant à leur montant antérieur de 400 dollars et exonérer de leur paiement les individus les plus modestes“.
Laurent Saint-Martin a conscience que le sujet n’est pas une priorité pour le gouvernement en plein bras-de-fer sur la “taxe GAFA” (Google, Apple, Facebook, Amazon) que la France veut imposer sur les géants de la tech. Un sujet épineux entre les deux pays évoqué “à plusieurs reprises” par les interlocuteurs américains des deux députés, précise Laurent Saint-Martin.