La plus californienne des réalisatrices françaises est à l’honneur ce mois-ci à Los Angeles. Conférence au Getty le 3 novembre prochain, début de l’exposition « Agnès Varda in Californialand » lancée le même jour au LACMA… Si la Cité des Anges a choisi de rendre un hommage spécial à Agnès Varda, c’est parce qu’en plus d’être une réalisatrice iconique, la « grand-mère de la Nouvelle Vague », âgée aujourd’hui de 85 printemps, considère Los Angeles un peu comme sa deuxième maison.
«Lorsque que je suis arrivée en 1967 avec Jacques Demy (ndlr : son mari, aujourd’hui décédé, qui était venu pour faire un film avec Columbia) nous étions très excités», raconte-t-elle lors de la présentation de son exposition au LACMA, devant la presse. « Nous étions très impressionnés par l’esprit de liberté qui régnait partout à Los Angeles, la culture, la contestation politique contre la guerre du Vietnam … La sexualité également, était comme un livre ouvert. Les artistes étaient tous un peu fous. Tout semblait en roue libre. C’était très inspirant».
Les années hippies à Hollywood
C’est comme cela que naît son premier film hippie-hollywoodien « Lions Love », sorti en 1970. « Aujourd’hui, Hollywood a beaucoup changé. A l’époque, même les réalisateurs qui étaient à fond dans le business, portaient de gros pendentifs avec le symbole love and peace. Aujourd’hui ils ne font clairement plus semblant d’être hippie !» s’amuse la réalisatrice qui, elle, a gardé un certain goût pour l’anti-conformisme, comme en atteste sa coiffure au bol bicolore blanche et marron, assortie à une tunique ample et à de petites sandales à talon.
A Los Angeles, Agnès Varda s’intéresse aussi de près aux problématiques sociales et politiques, qu’elle immortalise d’ailleurs en vidéo et en photos: plusieurs d’entre elles sont affichées au sein de l’exposition du LACMA. « J’ai été l’une des premières à filmer le mouvement des Black Panther » raconte-t-elle. Mais à l’époque, elle est loin d’imaginer que le documentaire de 30 minutes qu’elle tourne en 1968 à ce sujet, constituera plus tard l’un des témoignages les plus importants sur l’histoire de la communauté noire aux Etats-Unis. De retour en France en 1970, Varda repart une seconde fois à Los Angeles entre 1979 et 1981, où elle tourne un documentaire sur les peintures murales de la Cité des Anges intitulé « Murs, murs » et une fiction basée sur sa vie à Venice, « Documenteur ». Là encore plusieurs photos de ces années californiennes figurent dans l’exposition.
Une cabane pour voir le cinéma autrement
Au centre de la pièce, trône également l’une de ses célèbres cabanes, une œuvre créée à partir de bobines de film de “Lions Love”. « J’aime bien l’idée des cabanes. Les enfants en ont besoin comme d’un nid à eux. Quand nous grandissons, nous en avons nous aussi toujours besoin, mais nous pouvons inviter d’autres personnes à s’y asseoir. On y est bien à l’intérieur. On peut réfléchir, s’y reposer. Voir les films autrement. C’est une belle manière de transmettre mon amour du cinéma».
A 85 ans, Agnès Varda confie toujours travailler de la même manière. « Je ne peux y réfléchir qu’en me plongeant dans un bain très chaud, ou au lit. Lorsque des idées me viennent, j’oublie toujours de les noter. Je ne suis pas très organisée. Mais ce n’est pas grave : l’important c’est d’être toujours en train de penser en rêvant éveillé».