Bill Field et son orgue ont à peu près le même âge : quatre fois vingt ans et toujours ce même plaisir à faire revivre au public les trésors du cinéma muet. Nous sommes à El Segundo, une petite ville tranquille, dans la banlieue sud de Los Angeles. Comme chaque dimanche après-midi, le gérant de l’Old Town Music Hall guette impatiemment depuis l’entrée, l’arrivée des premiers spectateurs. “Nous sommes la dernière salle de cinéma de Los Angeles et ses alentours à diffuser des films muets accompagnés par un orgue”, explique-t-il fièrement. Pour ce passionné de Septième art, autrefois organiste dans une patinoire, tout a commencé en 1958. Avec son partenaire Bill Coffman – un pianiste d’église – ils décident de racheter et de restaurer un orgue à tuyaux de type Wurlitzer datant de 1925, utilisé à l’origine par une salle de cinéma Fox, à Long Beach. Ce n’est que dix ans plus tard, en 1968, qu’ils parviendront à trouver un domicile fixe à leur petite merveille. A El Segundo, le State Theater qui a ouvert ses portes en 1922, est alors vacant. Les deux Bill sautent sur l’occasion. C’est le début d’une belle aventure commune qui durera jusqu’en 2001, date à laquelle Bill Coffman s’éteint, dans la salle de son cinéma, où il faisait une sieste, en attendant Bill Field.
Aujourd’hui, à la cave, ce sont des centaines de bobines de films qui sont soigneusement conservées. “Depuis plus de 40 ans, rappelle Field, le Old Town Music Hall s’efforce à la fois de préserver et de présenter au public les trésors du cinéma muet, les classiques du parlant ou encore d’anciennes comédies musicales cultes comme Singin’ in the Rain, que nous projetons aujourd’hui”. L’accompagnement à l’orgue des films muets permet, quant à lui, de faire revivre aux spectateurs une époque révolue de l’histoire du cinéma. Créé à la fin du XIX ème siècle pour les besoins du théâtre et du Septième art naissant, l’orgue orchestral permet d’imiter plusieurs instruments et de reproduire une multitude de bruitages : castagnettes, xylophone, grosse caisse, sirène de bateau, klaxon. A l’époque, c’est une véritable aubaine pour les petites salles de cinéma qui n’auraient jamais eu les moyens de s’offrir un orchestre.
1.600 tuyaux, 268 instruments, 244 touches
A l’Old Town Music Hall, une fois passé le guichet-stand à pop-corn (8 dollars la place, 1 dollar le cornet), tenu par un jeune bénévole, on pénètre dans une drôle de salle de spectacle de 188 places, à la déco typiquement années 20, toute tendue de velours rouge. En voyant le petit orgue installé sur scène, on est loin d’imaginer qu’une véritable boîte à musique géante le complète, cachée derrière le lourd rideau de théâtre. Au total, la bête compte 1.600 tuyaux, 268 instruments et 244 touches sur quatre claviers différents. Sans parler des clochettes, sirènes, sifflets, gongs et autres gadgets.
Hommage à Greta Garbo, les 10, 11 et 12 février prochains, festival Laurel et Hardy les 16, 17 et 18 mars ou encore projection du film culte Les 10 commandements de Cecil B. DeMille les 30, 31 mars et 1er avril : le programme de ce début 2012 est délicieusement chargé. Et pourtant, côté finances, Bill Field avoue que ce n’est pas toujours rose : “Les recettes générées par les entrées ne suffisent pas. Heureusement qu’on peut compter sur les dons de certains irréductibles”. Reste donc à souhaiter à Bill Field que l’enthousiasme actuel pour le cinéma muet suscité par « The Artist » et « Hugo Cabret » profitera à son bébé.
Renseignements pratiques : (310) 322-2592 ou http://oldtownmusichall.wordpress.com
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Je suis un vieux, j’ai lu Guillaume Guéraud avec beaucoup de plaisir (notamment “chiens écrasés” et “affreux sales et gentils”) j’ai eu le bonheur de rencontrer le personnage (c’en est un) Guillaume Guéraud lors de la première édition de Polar A Nyons. Nous n’avons pas regretté d’avoir invité cet auteur si vrai. A la fois touchant et qui fait mouche avec un talent de la répartie qui doit beaucoup à la sincérité et au naturel.