Le bâtiment de cinq étages se dresse dans un recoin tranquille d’East Harlem, sur la 104e rue. Dans cette ancienne usine reconvertie en galerie et en studios, dix-sept artistes – et même une start up – travaillent dans de gigantesques salles tapissées de tableaux achevés ou non, au milieu de tables couvertes de pinceaux et de tubes de peinture.
Bienvenue à Art345, le bébé un poil bordélique du Parisien Norbert Waysberg. Cet ancien vendeur de produits informatiques reconverti en développeur immobilier reconverti en artiste a acquis ce bâtiment industriel de 5.000 mètres carrés en 2014 pour le transformer un an plus tard en espace d’exposition et de création. Au départ, seuls trois artistes se partageaient ces immenses locaux. Puis, “l’idée a germé de le transformer en communauté, se souvient Norbert Waysberg, qui pratique l’aquarelle sur papier depuis sept ans. Le lien communautaire est très important au niveau artistique. On a tous beaucoup grandi dans cet espace. Le fait d’être en interaction permanente a stimulé notre créativité. On a tous commencé à peindre plus grand, à sortir de notre zone de confort, à s’explorer, à se remettre en cause, à discuter…”
Des expositions collectives ont lieu régulièrement au rez-de-chaussée du bâtiment en présence d’environ “200 personnes” . La prochaine se tiendra du 9 juin au 9 juillet. “States of Water, States of Mind” rassemblera quatorze artistes internationaux invités ou membres d’Art345 – essentiellement des aquarellistes – autour du thème de l’eau. Les deux autres Français de l’atelier seront de la partie: la peintre Louise Laffaille et CharlElie Couture, qui a donc troqué son atelier-galerie de Chelsea pour les hauteurs de Manhattan. “Ça me manquait de ne pas avoir d’espace créatif, explique Louise Laffaille, étudiante à l’Arts Student League. C’est chouette aussi de pouvoir parler de technique et de nos interprétations dans notre langue maternelle” .
“Je voulais faire une plateforme pour permettre aux artistes d’exposer leur travail. C’est difficile à New York car il y a beaucoup de talents et pas mal d’arnaques, où on demande aux artistes de payer pour exposer, ajoute Norbert Waysberg. Aujourd’hui, certains d’entre nous travaillons avec des galeries reconnues et des marchands d’art établis. Cet espace nous a ouvert des opportunités.”
Aujourd’hui, Art345 est pratiquement plein: deux espaces sont encore à louer. Norbert Waysberg facture juste assez “pour couvrir les frais de fonctionnement” . D’ailleurs, l’aventure pourrait s’arrêter à n’importe quel moment: le bâtiment est en vente depuis plusieurs mois. “C’est aussi ça la beauté de cette initiative. Elle est éphémère, tout le monde le sait. On est conscient qu’il faut en profiter. Ça peut durer trois mois, six mois, un an. Mon ambition est de continuer à organiser des expositions tant que nous sommes là. ”