Comment Eric Weider, héritier d’un empire du fitness et de bodybuilding, s’est-il retrouvé à la tête d’une galerie dédiée au XIXe siècle ? «Eric Weider est passionné par Jules Breton depuis une vingtaine d’années, et son père collectionnait des objets napoléoniens : il a été bercé par la culture française», raconte Agnès Penot, la Française qui gère la nouvelle galerie de Beverly Hills, nommée 19C pour «XIXe Century».
Ouverte le vendredi 20 juillet, elle met en valeur des pièces de « qualité musée » dans un décor moderne, parfait mélange entre un appartement haussmannien et le Broad, à Los Angeles. «Nous voulons montrer que ces peintures peuvent trouver leur place dans une maison moderne. Le XIXe siècle ne veut pas forcément dire réactionnaire ou vieilli. Notre parti-pris est de le remettre au goût du jour», insiste Agnès Penot, qui a écrit une thèse sur le marchand d’art Goupil aux Etats-Unis, «l’un des premiers à avoir internationalisé l’art européen en 1847».
Dans leur collection, on trouve une cinquantaine de toiles –dont les tarifs varient de 15.000 dollars à plus de 2 millions pour une oeuvre en dépôt. Elles sont signées d’artistes français tels que Jean-Leon Gerôme, Jean-Baptiste-Camille Corot, Gustave Courbet, Théodore Rousseau, mais aussi de l’Hollandais Johan Barthold Jongkind. «On veut montrer le pré-impressionnisme, les artistes qui ont influencé les impressionnistes. Ces œuvres sont le témoignage d’une époque.» Ainsi, la Française revendique de «sortir des sentiers battus» et d’essayer de donner de la reconnaissance à des tableaux méconnus et tombés dans l’oubli.
Un lieu, trois personnes
19 C Gallery est née de la réunion de trois univers, trois personnes qui n’ont jamais dirigé de galerie. Eric Weider, qui était prédestiné à rester dans le bodybuilding, cultivait l’idée depuis de nombreuses années. De par sa passion, il a fréquenté nombre de maisons d’enchères et s’est lié avec Polly Sartori, qui a travaillé pour Christie’s. Il ne leur manquait plus que l’expertise d’Agnès Penot, originaire de La Rochelle et recommandée par un conservateur du Getty, pour faire des recherches pour la galerie. Finalement, elle en est devenue la responsable.
Le lieu de Beverly Hills s’est imposé. «Art District est dédié à l’art contemporain, notre clientèle se trouve davantage dans le quartier de BH», analyse Agnès Penot, précisant qu’ils visent aussi une clientèle touristique, avec l’Hotel Montage dans le voisinage. Ils ne s’y sont pas trompés, deux autres galeries locales, à la philosophie et aux collections différentes, sont également dédiées au XIXe siècle.
Après des ouvertures retardées à de nombreuses reprises, en raison de lenteurs administratives et des travaux qui s’éternisent, la galerie 19C prend donc son envol. Une œuvre a déjà été vendue au musée d’Orsay : «certaines peintures ne sont pas commerciales (comme des scènes de rue dans le Paris de l’époque), mais davantage destinées aux musées.» Pour stimuler les ventes, les expositions vont s’enchaîner chaque mois. «Début août, nous mettons l’accent sur la culture orientaliste, Beverly Hills se transformant en Dubaï à ce moment-là, assure Agnès Penot. Le XIXe est une époque où on a redécouvert le Moyen-Orient, au travers de Delacroix, Jean-Léon Gerôme…» En septembre, pour le vernissage officiel, la galerie revêtira ses plus belles peintures.