Les usagers du réseau de transports en commun d’Austin ne se sont rendus compte de rien.
Mais depuis le 19 août, c’est une filiale de la régie autonome des transports parisiens (RATP) qui opère quelque 79 lignes de bus de Capital Metro (soit le transport d’environ 21 millions de passagers par an dans 250 véhicules…). Ou plus exactement, la filiale d’une filiale de la RATP : McDonald Transit Associates appartient à RATP Dev America, implantée à New York et elle-même rattachée à l’entreprise publique française.
Ce contrat, représentant un chiffre d’affaire cumulé de 400 millions de dollars pour sept ans –« l’un des plus importants contrats de transport public urbain par bus aux Etats-Unis », selon McDonald Transit Associates- est une belle opération pour la sous-filiale de la RATP, déjà implantée dans seize Etats américains. Mais aussi pour sa maison mère, RATP Dev America, dont le directeur, Mathieu Dunant, affiche de grandes ambitions aux Etats-Unis, « un marché de 34 milliards de dollars devant faire face à des défis majeurs comme la hausse du trafic, des variations importantes des prix du pétrole et une conscience environnementale grandissante du public ».
Une mission : réduire les coûts
Une bonne affaire pour la RATP, moins pour les 853 anciens salariés de Capital Metro. S’ils ont été repris aux mêmes niveaux de salaires par McDonald Transit Associates et l’autre entreprise sélectionnée à l’issue de l’appel d’offres, ils n’ont obtenu aucune garantie de maintien de leur plan d’épargne retraite, ni leur couverture santé. « Des négociations sont en cours » à ce sujet, indique Robert Babbitt, le P-DG de McDonald Transit. « Outre des salaires d’embauche des nouveaux salariés sans doute moins élevés, l’évolution des rémunérations et des avantages devrait être moins avantageuse que par le passé », a déjà prévenu Elaine Timbes, la directrice de l’exploitation de Cap Metro. La régie municipale compte ainsi économiser 35 millions et demi de dollars sur sept ans.
La prise de contrôle par McDonald Transit doit aider Cap Metro à renouveler sa flotte de bus et assainir ses finances. Le dernier rapport financier de Capital Metro, portant sur le mois d’août, fait ainsi état de pertes s’élevant à plus d’un million de dollars. L’entreprise profitera des économies d’échelle offertes par Mc Donald Transit. L’an dernier, Cap Metro avait déjà été obligée de transférer ses salariés vers une autre structure, StarTran, les syndicats n’ayant désormais plus le droit de cité dans les entreprises publiques du Lone Star State. C’est que les avantages sociaux des employés de Capital Metro semblaient excessifs aux yeux des parlementaires texans en comparaison de ceux d’autres régies de transport de l’Etat.
Un vaste plan d’économies « sur le dos des salariés » s’annonce, selon Jay Wyatt, le président de l’antenne locale de l’Amalgamated Transit Union. Celui-ci n’est rendu possible que parce que le contrat définissant le cadre d’emploi et l’ensemble des bénéfices des anciens salariés de Capital Metro a expiré, souligne le syndicaliste. L’Amalgamated Transit Union dénonce la mise en œuvre de dispositions temporaires non négociées. Plusieurs plaintes auprès du National Labor Relations Board, l’agence fédérale chargée de trancher les conflits sociaux, ont déjà été déposées.
Bientôt une grève ?
« Les discussions sont sur le point d’aboutir »,assure cependant John Bartosiewicz, le vice-président de McDonald Transit en charge des négociations avec le syndicat. Le directeur juridique adjoint de l’Amalgamated Transit Union à l’échelle nationale, Dan Smith, continue néanmoins d’échanger avec la CGT à Paris. « A Austin, la RATP a adopté une attitude très agressive et négative. Elle semble déterminée à prouver qu’elle est aussi une coupeuse de coûts, même si cela veut dire qu’on pousse des travailleurs dans la misère, car à treize dollars de l’heure, le salaire de départ n’était pas élevé à Cap Metro et le sera encore moins demain”, commente-t-il.
« Si l’attitude de McDonald ne change pas, il est probable que nous nous mettions en grève, peut-être très rapidement », annonce Jay Wyatt. Les membres du syndicat à Austin ont d’ailleurs approuvé la grève il y a deux semaines. Les usagers pourraient alors remarquer le changement d’opérateur.
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C’est ça le capitalisme …