Morgan Hermand-Waiche le dit d’un ton définitif : « Aux Etats-Unis, Victoria’s Secret est en situation de quasi-monopole. Et le reste, c’est soit très cher, soit nul. » Un créneau était à prendre, et ce Marseillais d’origine, New-Yorkais d’adoption, s’y est engouffré.
Alors qu’il était en MBA à Harvard, il a créé Adore Me, une marque de lingerie en ligne. Certains de ses professeurs ont été parmi ses premiers investisseurs. La première année, en 2012, il a vendu 100.000 soutien-gorges. Depuis, ses ventes ne cessent d’augmenter (+357% en 2013) à grands coups de campagnes de pub sur internet. Les investisseurs ont été convaincus. Adore Me a levé 11 millions de dollars en deux ans.
Autant le dire : Adore Me ne vend pas de lingerie chic à la française. Mais fait plutôt dans le push-up et le flashy. « Notre cliente, c’est l’Américaine entre 20 et 30 ans, qui aime la dentelle, les couleurs, qui veut être sexy. C’est la même que celle de Victoria’s Secret. » Sauf qu’Adore Me est moins cher. Et se renouvelle plus vite. Et a plus de modèles. Et va plus loin dans les grandes tailles, selon le fondateur.
Tout n’a pas été rose pour Adore Me : à ses débuts, la start-up a flirté avec le dépôt de bilan. « C’est une industrie complexe. Il faut bien négocier avec les fournisseurs, qui imposent de commander des quantités pharaoniques plusieurs mois à l’avance. » Désormais, l’affaire est sur les rails. Adore Me compte 38 salariés, dont une prise de guerre : une ancienne directrice du design… de chez Victoria’s Secret.
Les modèles sont fabriqués en Asie – « comme 90% de la lingerie dans le monde », relève Morgan Hermand-Waiche. Un continent qu’il connaît bien, pour y avoir travaillé quelques années comme consultant, chez McKinsey.
« La lingerie, c’est super. Quand je dis ce que je fais, les gens ouvrent des grands yeux. Cela intrigue », constate Morgan Hermand-Waiche, dont la famille travaille, à Marseille, dans le milieu de la confection. « Mais ce qui me plait surtout, c’est de monter une entreprise. C’est fascinant de construire quelque chose à partir de rien. »
D’ailleurs, il se plait à raconter qu’Adore Me n’est pas sa première idée. En 2001, alors qu’il était étudiant à l’école des Mines de Paris, il rencontre plusieurs incubateurs pour leur présenter son projet : une plateforme de sous-location d’appartements entre particuliers. « Tout le monde m’a dit que mon idée était farfelue, que personne n’accepterait de sous-louer à un inconnu. » Pas au bon endroit, pas au bon moment…
Depuis, la roue a tourné. Le patron de 32 ans partage son temps entre son appartement à Chelsea, ses bureaux dans le Garment District de Manhattan, des aller-retour en Asie et en Roumanie, où Adore Me dispose d’une petite équipe. Ce qui lui fait le plus plaisir ? Que Victoria’s Secret le toise comme un concurrent sérieux. « La CEO a déclaré qu’elle se méfiait de nous : ça, c’est super sympa ! »